Compte rendu de la journée du 20 octobre 2007

Mise en perspective de la journée

La journée du 20 octobre 2007 sur l’Innovation dans les églises et le courant de l’Eglise émergente a eu lieu malgré la grève des transports. Elle n’en est toutefois pas sortie indemne puisqu’une quinzaine d’inscrits n’a pu venir et que plusieurs ont rejoint les lieux avec des retards variables. La rencontre a pu commencer dès 9h30. Les participants étaient extrêmement divers, par leurs milieux d’origine (catholiques réformateurs, évangéliques, réformés), par leurs origines nationales et culturelles (belge, suisse, américaine, britannique, hollandaise, africaine…), par leurs itinéraires (à l’intérieur d’une Eglise, en marge, dans une pluralité de cultures), par leurs positionnements (pasteurs et prêtres, professeurs dans des Instituts bibliques, théologiens(es), acteurs dans des organisations et associations engagées dans l’évangélisation, chrétiens actifs dans une gamme très variée de groupes, d’associations, d’églises locales, de paroisses).

Matinée : l’innovation dans les églises

Le riche exposé de Jean Hassenforder a introduit la journée <<Texte intégral ci dessous>>. Il a bien mis en perspective, les changements majeurs de la société en regard avec l’urgence, pour les églises, de s’y adapter sans trahir ou édulcorer le message de l’évangile (l’intervention intégrale est publiée sur le site de Témoins).
L’assistance s’est ensuite répartie en quatre ateliers d’échanges sur les questions suivantes :
Echanges en atelier
o En quoi l’innovation dans l’église vous paraît-elle nécessaire ?
o Avez-vous un exemple d’innovation à partager ?
o Si non, que faudrait-il faire pour pouvoir innover ?

Quelques affirmations d’un des ateliers :

o L’innovation est nécessaire puisque la vie même est mouvement et que la société bouge.
o Le verset des Proverbes « Le scribe avisé tire de son trésor des choses anciennes et nouvelles » invite à puiser autant dans le passé que dans l’avenir qui se profile.
o Le désir d’évangéliser ou de partager simplement sa foi va de pair avec le souci d’être accessible à autrui, de comprendre dans quel monde il évolue.
o Dans une église locale, cependant, le besoin d’innovation n’est pas ressenti par tous. Il faut pouvoir donner une place aux deux aspirations : innover / ne pas innover.
o Les nouveautés se figeant vite en coutumes et le risque de déphasage est toujours à surveiller.

Quelques innovations partagées :

o Les cours Alpha
o La naissance d’églises de maisons où les structures sont définies par les gens qui les composent
o Une forme de culte trans-générationnel et créatif où l’on invite à exprimer son ressenti par l’art
o Une forme de culte, axé sur le relationnel, avec pause café de 20 minutes au milieu du culte
o Un effort original d’évangélisation autour de la fête des rameaux.
La liste n’est pas exhaustive et l’on a aussi parfois constaté que l’« innovant » des uns est parfois la pratique habituelle des autres.

De la mise en commun des ateliers est ressorti le besoin d’innovation qui s’enracine souvent dans la souffrance, dans un manque à combler. Identifier et répondre à cette souffrance, à ce manque induira des changements. Mais il n’y a malheureusement pas assez de temps de parole libre dans les communautés. Or, c’est en offrant des instances où s’exprimer que pourront se dire les frustrations, les désirs et les aspirations permettant d’évoluer et d’avancer.

Parmi les témoignages remontés en plénière, quatre sont à particulièrement remarquer :

– Le témoignage de Michel Anglarès sur la « Maison d’église » de la Défense, une « paroisse » catholique atypique qui tente d’humaniser ce quartier des affaires et d’apporter, dans le milieu du travail, un partage de foi et de réflexions. On n’y officie ni baptême, ni mariage, ni enterrement et la messe est dite le mercredi. Des conférences, des carrefours y sont proposés. On essaie de rejoindre les gens par le biais de leur vie professionnelle, on écoute leur souffrance. L’équipe aide aussi les personnes sans domiciles fixes qui circulent dans le quartier.
– Le partage de l’association suisse « Engage » qui incite associations et sociétés à travailler sur l’idée « fleurissez où vous êtes plantés » en concevant des projets à réaliser par des groupes réunissant chrétiens et non chrétiens.
– Les nouvelles formes de communautés issues du mouvement catholique « Nous sommes aussi l’Eglise » et des groupes « Parvis » où, dans un souci d’autonomie, s’inventent de nouvelles formes de célébrations. Exemple cité par Alice Gombault : une eucharistie vécue sans présidence, sans coupure entre laïc et clergé, homme et femme, où tous se retrouvent autour d’une table vide d’où émane alors d’autant plus la Présence de Celui qui rassemble.
– L’expérience de Maguy Schaerer : dans une église de maison l’écoute attentive des enfants a conduit les responsables à recevoir leur souhait de se réunir entre eux, seuls, pour partager, prier et étudier la bible. L’enfant qui anime n’est cependant pas livré à lui-même. Il reçoit une formation et la vigilance des adultes demeure. Cet enseignement donné aux enfants, à hauteur d’enfant, accroît chez eux le goût de la Parole et des échanges sur les questions spirituelles. (Voir le texte de Maguy Schaerer sur le site.)

La matinée s’est achevée sur la brillante synthèse de Gabriel Monet <<Texte intégral ci dessous>>, pasteur adventiste de l’église de l’Espérance à Paris, qui ayant circulé dans les quatre ateliers, a su dégager les principales tensions ressenties face au désir d’innover : tension entre la forme (la structure) et le fond (la théologie), entre agir dans ou hors de l’église, tension entre l’envie de changement radical ou d’aménagements progressifs, entre convergence (mouvement vers l’unité) et divergence (mouvement vers la diversité) tension entre l’innovation conçue comme valeur ajoutée ou comme nouveauté absolue, entre le rôle de l’individu et celui de la communauté et, tension enfin entre la base et la hiérarchie.
Innover pour l’innover n’a en soi pas de sens (cf. l’argument commercial : « achetez, c’est nouveau ça vient de sortir ») L’innovation souhaitable est au service d’un objectif clair (répondre à un besoin, à un malaise, à une souffrance…).
L’intervention intégrale est publiée sur le site de Témoins.

Après midi : l’Eglise émergente

Quelle différence entre église innovante et église émergente ? L’objectif de l’une est de rénover l’existant (ex : le rendre plus accueillant, plus parlant aux chrétiens comme aux non chrétiens) l’objectif de l’autre est de concevoir, croyants et non croyants ensemble, des lieux de rencontres correspondant aux besoins, à la culture des gens d’aujourd’hui et où puisse aussi se partager l’évangile.
Intervention d’Andy Buckler
Peu répandu en France, le phénomène se développe fort en Grande-Bretagne et Andy Buckler, pasteur réformé à Mantes la Jolie, a présenté une vidéo, réalisée par « Fresh expressions », une association patronnée par l’église anglicane et par l’église méthodiste, sur des communautés émergentes britanniques.
En Grande Bretagne en effet, depuis plusieurs années, des églises traditionnelles ont commencé à analyser leur déclin et à mener une réflexion théologique sur des initiatives locales originales, émergeant ici et là. En 2004 elles ont publié un rapport qui classe ces nouvelles formes communautaires en 12 catégories (cibles générationnelles, lieux inhabituels, périodicité inhabituelles etc). Devant leur ampleur l’évêque de Cantorbéry a décidé de les accueillir en encourageant la vision d’une Eglise « mixte », comprenant à la fois les églises classiques et les nouveaux styles de rencontres.
Quant à savoir s’il faut parler ici de missions évangélisatrices ou de tentatives pour sauver l’église, la question n’a pas lieu d’être puisque l’église n’a de sens que si elle est évangélisatrice.

Les trois exemples suivants de la vidéo (sous titrés en français par Gérard Gelbart) ont été projetés :

Premier exemple : « Legacy XS » l’église de skaters à Benfleet.
Les jeunes viennent y pratiquer ce sport et partager l’évangile. Lors du culte, la louange fait la part belle à la danse sur patins. Le concept de cette communauté a été largement développé par les jeunes eux-mêmes. Et ça roule : 2 200 membres sont inscrits au parc à skate qui tourne avec 20 salariés ou bénévoles et 60 personnes assistent régulièrement au culte.

Second exemple : « Taste and see », l’église « café » à Kidsgrove.
À l’origine, 4 personnes autour d’une table, dans un café, qui renversent la question : Que faire pour que les générations des 20 à 40 ans viennent à l’église ? En : Qu’est-ce que ça donnerait de vivre l’église dans ce café ? Quelle est la culture des gens qui nous entourent et comment amener l’église dans leur environnement culturel ? Ainsi est né un drôle de café, lieu d’échanges et de louanges décontracté, où sont aussi implantés des cours Alpha.
Résultat : une moyenne de 150 personnes y entre chaque semaine, 30 assistent au culte du mercredi et 10 suivent les cours Alpha.

Troisième exemple : “Somewhere else”,
Dans cette église conviviale de Liverpool on se réunit autour de la fabrication du pain ! Et là, tout en pétrissant la pâte les gens partagent ce qu’ils sont, leurs expériences de vie etc. À l’origine il y a la disparition progressive d’une communauté méthodiste et une femme pasteur à qui l’on demande d’essayer quelque chose de neuf. Elle passe une année à parcourir les rues du quartier pour rencontrer les gens puis lance le projet d’une « boulangerie communautaire ». Aujourd’hui, chaque mois, 34 personnes y font du pain et 37 se réunissent pour le culte.

Exposé de Gabriel Monet.

Dans le prolongement immédiat de la vidéo, Gabriel Monet, qui prépare un doctorat sur l’église émergente, a donné un remarquable aperçu de ses recherches. Il a clarifié la notion d’église émergente, noté brièvement les orientations qui caractérisent ce mouvement avant d’en souligner l’enracinement biblique et théologique en rappelant les trois dimensions de l’Eglise. L’église doit être « incarnationelle » : immergée, comme Jésus, dans la culture de son temps. L’église doit être « missionnelle » : répondre pleinement à la mission que lui a désigné le Seigneur. Le mot mission ne se réduit pas ici au sens classique d’œuvre de l’église mais, englobant action sociale et évangélisation, la renvoie à sa finalité : faire émerger le Royaume de Dieu. L’église doit être « plurielle » dans sa forme : vécue à travers les différentes langues et cultures des peuples et non pas figée dans une ou des forme(s) immuable(e).
Son intervention intégrale est publiée sur le site de Témoins.

Exposé d’Alain Gubert.

Alain Gubert, membre du groupe « Recherche » de Témoins, qui s’intéresse depuis plusieurs années déjà au déphasage des églises traditionnelles et professeur en marketing à Nevers a ensuite apporté son éclairage particulièrement percutant sur l’apport des communautés émergentes.
En effet, appliquer la grille « marketing » à la mission de l’église s’avère pertinent puisqu’il s’agit d’adapter une offre à une demande. Si le contenu (l’évangile) de l’offre ne change pas le contenant (la pratique ecclésiale) a tout à gagner à répondre au mieux à la demande (à l’attente des gens). Il importe donc de savoir à quel genre de personnes d’adresse aujourd’hui l’évangile. À des personnes qui se sont certes éloignées des institutions mais chez qui demeurent des aspirations spirituelles croissantes, des personnes qui font preuve d’une maturité de réflexion, qui sont en attente de dialogues, de reconnaissance, d’émotion, de relations et qui ont le désir d’être acteur de leur vie tout en recherchant la sécurité.

Ce sont ces demandes implicites ou explicites que les communautés chrétiennes émergentes ressentent et auxquelles elles tentent de répondre. Elles se créent donc en phase avec la culture du milieu concerné, manifestent une forte dimension relationnelle, un sens de l’accueil, de l’écoute et de la créativité. Elles se développent en réseau, partagent leurs expériences et s’autorisent l’accès à une grande diversité de ressources car, ouvertes aux problèmes des personnes, elles ne se cantonnent pas au spirituel (Jésus ne s’y est pas cantonné). Enfin et surtout, à l’origine elles s’établissent sur un consensus commun, non sur les schémas classiques préétablis, d’où une multiplicité de modèles, conçus et imaginés à partir des divers contextes.

Ces initiatives se déploient dans la prière, à l’écoute du Saint Esprit. Elles ne s’édifient pas contre les modèles traditionnels (qui répondent d’ailleurs encore à une certaine demande) mais à côté d’eux et souvent avec leur soutien.
Cependant, à long terme, l’institution elle-même n’est-elle pas appelée à changer son approche et à se « convertir » pour mieux vivre sa dimension « missionnelle » ?
L’intervention intégrale est publiée sur le site de Témoins.

Il y eut ensuite un temps d’échanges, animé par Marie Thérèse Plaine, à partir des questions suivantes :

– Réactions aux expériences de terrain (la vidéo), aux exposés ?
– Ceci a t-il suscité un désir d’église émergente ?
– Réflexions sur des pistes de travail ?

Face à la diversité des interventions (sur la place de l’enfant dans le contexte des sociétés post-modernes, le besoin de clarifier des termes qui n’ont pas la même connotation selon les milieux, le rêve de communautés « trans-dénominationnelles » incluant des non croyants, etc.) je conclurai sur le sentiment commun que les lieux et les moments, où peuvent se vivre des rencontres interconfessionnelles, créent plus de liberté pour avancer car ils échappent au danger du sectarisme et permettent de sortir des cadres institutionnels. Ils sont des temps privilégiés de partages et de créativité.

Au terme de cette journée, qui peut appeller une suite, un questionnaire sur le bilan de la rencontre et des projets pour l’avenir a été remis à chacun.

Françoise Rontard

 

LES TEXTES DES INTERVENTIONS DE LA JOURNÉE

 

L’innovation dans les Eglises de Jean Hassenforder : texte introductif à la journée.

Chers amis
Nous savons ce qui nous rassemble aujourd’hui : ce désir d’une Eglise pertinente en phase avec des chrétiens en demande d’authenticité et avec un grand nombre de personnes en recherche, en chemin. Nous portons ce désir à Témoins depuis des années. Et nous pensons que c’est l’Esprit Saint qui, aujourd’hui encore, inspire et guide en nous ce désir.
Témoins : une culture, un observatoire.

Puisque Témoins est à l’origine de cette initiative, examinons d’abord en quoi il se relie au projet qui nous rassemble.
Témoins, association chrétienne interconfessionnelle, est né dans les années 80 à partir de deux groupes émergents (1). La culture de Témoins présente ainsi plusieurs caractéristiques.
À partir des courants spirituels qui y ont convergé en s’y harmonisant : courant évangélique, charismatique, humanisme chrétien…, nous voulons nous situer au cœur du message chrétien, ancré dans la Parole biblique, en référence aux grandes confessions de foi de la première Eglise, et dans un vécu en phase avec la culture et la société d’aujourd’hui.
La rencontre entre conviction et ouverture débouche sur un témoignage en forme d’une recherche constante de compréhension, de dialogue et d’expression.
Dans le même mouvement, la culture de Témoins est globale et se manifeste sur des registres différents du personnel au culturel.
Association chrétienne interconfessionnelle, Témoins rassemble des chrétiens inspirés par des cultures catholique, protestante, évangélique… en chemin dans des itinéraires variés, au sein ou en marge des Eglises. A ce titre, Témoins est indépendant par rapport aux politiques institutionnelles, mais , en même temps, des amis et membres de Témoins sont présents dans des milieux confessionnels très variés. On peut donc envisager Témoins comme un réseau à travers lequel l’Esprit Saint peut se manifester et susciter une intelligence collective.
Ainsi Témoins a été et est en position d’entendre les questions et les aspirations qui se manifestent aujourd’hui. Depuis une dizaine d’années, à partir d’une approche en sciences sociales, un groupe de recherche s’est développé sous le vocable de « chrétiens pour la recherche et l’innovation ». Face au constat global du recul de l’influence des Eglises, nous avons émis l’hypothèse d’un déphasage entre les pratiques des Eglises et le changement culturel. Nous avons pu vérifier cette hypothèse à partir de recherches nationales et internationales, en mettant en évidence, en regard, les innovations qui, dans certains cas, renversent la tendance au déclin.

Les pratiques d’Eglise en question.

En France, au cours des dernières décennies, l’influence des Eglises historiques a beaucoup diminué. Tous les indicateurs convergent, et témoignent d’une chute de la pratique , notamment en milieu catholique (2). Parallèlement, l’état des croyances se modifie comme l’indique la croissance de la catégorie : « sans religion » qui devient majoritaire dans les générations les plus jeunes (3).
En 1998 déjà , le fondateur de « La Vie catholique », Georges Hourdin poussait un cri d’alarme dans son livre : « Le vieil homme et l’Eglise » (4). Mais le déni a souvent prévalu. Les historiens et les sociologues nous permettent d’analyser les facteurs de cette implosion. Dans son livre sur « La Seconde Révolution française » (5), Henri Mendras nous montre le bouleversement du genre de vie dans le grand changement culturel des années 60,70, 80. Le diagnostic posé par Danièle Hervieu-Léger dans son livre : « Le pèlerin et le converti » (6) est particulièrement éclairant : nous assistons à l’implosion de « la civilisation paroissiale ». Mais elle nous montre aussi que le potentiel spirituel est toujours bien là : « L’affirmation de l’autonomie croyante est vraiment le trait majeur de la modernité religieuse. Les croyances se développent, mais le fait nouveau, c’est que les grandes Eglises ne sont plus en mesure de fournir des canaux, des dispositifs organisateurs de ces croyance s ». En regard, des approches nouvelles apparaissent. Le développement des Eglises évangéliques en France, relaté par Sébastien Fath dans son livre : « Du ghetto au réseau » (7), est une de ces figures.
Une approche comparative à l’échelle internationale permet de constater que les tendances enregistrées en France traversent plus ou moins l’ensemble du monde occidental. A cet égard, les études de Stuart Murray (8) et de Michael Moynagh (9) en Grande-Bretagne, sont particulièrement éloquentes. Michael Moynagh nous montre ces tendances à l’œuvre. Les Eglises historiques britanniques sont en déclin, et, à terme, certaines sont menacées dans leur existence spécifique. Mais, à partir des innovations qui apparaissent en regard, Michel Moynagh montre que la chute n’est pas une fatalité. Face à la mutation culturelle, il appelle à une mutation correspondante dans les formes d’Eglise. C’est le courant de l’Eglise émergente.

La dynamique de l’innovation.

Le phénomène de l’innovation est présent dans toute l’histoire. Ainsi les églises du Nouveau Testament innovent et se différencient en fonction des milieux rencontrés. Au cours des siècles, on peut établir une relation entre l’apparition de communautés et de dénominations nouvelles et les besoins nouveaux auxquels l’Eglise se trouve confrontée. On peut, par exemple, étudier sous cet angle le développement du méthodisme au XVIIIè siècle en Grande-Bretagne. Pour répondre aux besoins et aux valeurs spécifiques des milieux populaires, Wesley invente une Eglise alternative.
Mais la force de l’innovation est particulièrement visible dans les dernières décennies lorsque le changement culturel s’accélère et creuse un écart entre de nouveaux comportements, de nouvelles représentations et les pratiques d’Eglise. Ainsi le sociologue Wade Clark Roof montre bien comment une nouvelle génération d’églises est apparues aux Etats-Unis pour répondre aux aspirations des « baby boomers » à la recherche d’authenticité et de créativité (10). Ces églises ont permis à cette nouvelle sensibilité de s’exprimer dans l’Eglise au lieu de s’en éloigner, comme cela a été largement le cas en Europe. Le dynamisme chrétien s’est manifesté aux Etats-Unis à travers des vagues successives d’initiatives comme les églises pentecôtistes et charismatiques, les communautés orientées vers les personnes en recherche (seekers) comme Willow Creek, et, aujourd’hui, les églises émergentes, à chaque fois en réponse à des sensibilités spécifiques. On pourrait analyser la conjoncture britannique dans la même perspective. En quelques années, le courant de l’Eglise émergente, reconnu et encouragé par les Eglises anglicane et méthodiste sous le vocable de « Fresh expressions » a développé son influence et sa visibilité.
Cependant, les innovations ne se manifestent pas seulement à travers des initiatives locales. Elles requièrent également une réflexion théologique capable de dépasser des systèmes de représentations marquées par les mentalités, les formes sociales et culturelles du passé. Elles s’inscrivent également dans une ecclésiologie inspirée par le NouveauTestament et en rupture avec l’héritage d’une chrétienté hiérarchisée.
Notre époque est caractérisée par une grande mutation culturelle. Dans tous les domaines de la vie, au plan économique, social, technique…, la création et le renouvellement s’expriment à travers des innovations qui induisent et balisent le changement dans un processus souple et dynamique. J’ai moi-même participé à ce phénomène dans le domaine de l’éducation (11). Les recherches entreprises sur les processus d’innovation peuvent nous éclairer sur la manière dont ils se déroulent également dans le champ des Eglises. Ainsi, les systèmes sociaux centralisés et hiérarchisés sont peu propices aux innovations. Celles-ci interviennent là où les acteurs de terrain prennent conscience des dysfonctionnements et, par ailleurs, disposent d’une autonomie suffisante pour mettre en œuvre une imagination créatrice. Ils s’engagent alors dans un processus de transformation en expérimentant des approches nouvelles. Les innovations les plus pertinentes exercent une influence et se propagent. Des dispositifs de recherche, de formation et d’information peuvent favoriser cette évolution .

L’Eglise émergente : une innovation récente et radicale en phase avec la nouvelle culture

Nous entrons dans une société de plus en plus diversifiée. En effet, les rythmes d’évolution varient . L’internationalisation se fait de plus en plus visible. Ce mouvement se traduit par l’apparition de sous-cultures. Dès lors, en répondant à des contextes divers, l’innovation est appelée à se diversifier. Ainsi les courants d’innovation sont eux-mêmes divers depuis les églises de maison jusqu’aux « mega churchs ». Les églises dynamiques des pays du sud font également leur apparition en Europe.
En traitant de l’innnovation en Grande Bretagne, Michael Moynagh évoque également les églises classiques. Elles répondent à un public traditionnel . Y introduire des innovations radicales désorienterait ce public et susciterait des divisions. Mais on sait que de plus en plus de chrétiens entrés dans les nouvelles cultures, n ‘y trouvent plus leur place et les quittent (12). Certaines églises, à même d’innover davantage, les recueillent souvent. Cependant la crise est encore beaucoup plus grave. En effet, le contact est rompu entre les églises et des pans entiers de la société britannique . Le problème est le même en France lorsqu’on considère la montée des « sans religion » dans les jeunes générations où ils sont devenus quasi majoritaires.
Ainsi appelle-t-on le développement de nouvelles communautés chrétiennes immergées dans la nouvelle culture et inventant de nouvelles expressions. Cette Eglise émergente sera une Eglise « incarnationnelle » et « missionnelle ». Ce sera une Eglise capable de reconnaître l’action du Saint Esprit à l’œuvre dans nos contemporains, une Eglise « rela tionnelle » inspirée par l’amour du Dieu Trinitaire et exprimant son attention à l’autre dans le respect et le dialogue (13).
Le courant de l’Eglise émergente date de quelques années seulement, mais il se manifeste déjà dans le paysage chrétien en Grande-Bretagne. Plus généralement, ce courant s’inscrit dans la mutation culturelle du monde occidental. Ainsi est-il également actif aux Etats-Unis dans un contexte sans doute plus conflictuel qui prend la forme d’un affrontement théorique entre deux cultures : le conservatisme du Sud et le sécularisme du Nord. Dans son livre : « Generous orthodoxy » (14), Brian McLaren, lui-même exposé, nous invite à dépasser ces antagonismes dans une expérience de foi qui allie le cœur et l’intelligence. Comme en son temps, le Renouveau charismatique, le courant de l’Eglise émergente apparaît dans des contextes variés. C’est un chantier en pleine expérimentation .

Où en sommes-nous en France ?

Cette rencontre va nous permettre d’avancer dans la réflexion. Voici de premières pistes issues d’un essai de bilan publié dans un récent numéro de Perspectives Missionnaires sur les « Nouvelles formes d’Eglise » (15).
Tout permet d’affirmer que beaucoup de gens en France cherchent à sortir des chemins battus. Des sociologues mettent en évidence la prégnance des aspirations spirituelles. Le désir de communiquer et de partager se manifeste à grande échelle sur internet. Le succès des cours Alpha témoignent, entre autres, de nouvelles dispositions relationnelles. Et partout, en France comme ailleurs, dans des milieux chrétiens différents, enquêtes et observations concordent pour nous dire qu’on attend des formes nouvelles qui allient authenticité, expression, créativité…
Certes, comme on le sait, une tradition d’autorité descendante est peu propice à l’innovation. Mais, en quelques décennies, la France s’est transformée. En milieu catholique, si les pesanteurs de l’institution demeure, le Concile Vatican II a cherché une pertinence et ouvert des portes. Et, au long des années, on a pu enregistrer une multitude d’initiatives (16) comme les groupes et les communautés inspirées, à telle ou telle étape, par le Concile Vatican II (17), la recherche des années post-68 (18), le Renouveau charismatique (19) et aujourd’hui un désir de sens. La croissance des Eglises évangéliques s’inscrit, elle aussi, dans cette conjoncture. Comme dans les pays anglophones, on peut attendre que des chrétiens issus de ces Eglises apportent une contribution pionnière dans le domaine de l’Eglise émergente (20).
Cependant, à l’aune des attentes engendrées par la mutation culturelle, les requêtes sont immenses. En France comme en d’autres pays, on attend le développement d’une Eglise émergente en phase avec la culture nouvelle. Comment pouvons-nous répondre à cette demande, à ce désir ? A l’écoute de l’expérience, le développement d’une offre correspondante requiert une vision élargie. En effet, pour avancer ici, il est nécessaire d’allier ensemble plusieurs conditions : une conviction forte nourrie par l’Evangile, une ouverture culturelle et une ouverture institutionnelle. (21). C’est sur ce terreau que les pousses de l’Eglise émergente pourront grandir. Comme l’écrit Michael Moynagh, l’Eglise émergente, c’est d’abord un état d’esprit. C’est aussi un processus (13). Il y a en France un potentiel en attente de ce processus. En 2004, Henri Mendras, l’auteur de « la Seconde Révolution Française » écrivait un livre de prospective. « Si l’Eglise catholique accepte l’évolution du Concile Vatican II en faveur du respect de la liberté religieuse, elle doit réviser complètement son organisation, pour se transformer en un ensemble de petites communautés reliées par des réseaux, chaque réseau correspondant à une tonalité particulière de tendances et de sentiments, où les prêtres seraient des experts conseillers des communautés » (22). Cette recommandation adressée au milieu catholique nous paraît avoir une portée bien plus vaste. De la part d’un grand sociologue, nous pouvons l’accueillir comme une légitimation de l’Eglise émergente.

Quel enjeu ?

Chers amis
A la différence des précédentes journées où l’accent avait été mis sur le message apporté par des intervenants expérimentés, nous sommes appelés aujourd’hui à une réflexion collective sur les voies de l’innovation. Nous allons partager nos expériences pour discerner les aspirations, les tendances, les propositions. A travers cette intelligence collective, l’Esprit Saint va nous inspirer. Nous pourrons ainsi ouvrir des pistes. En regard des besoins, quels sont les courants actuels d’innovation ? Que pouvons-nous en apprendre ? Comment pourraient-ils améliorer leur efficacité et leur pertinence ? Au plan de l’Eglise émergente, il semble que le potentiel est là et attend qu’une offre se mette en place pour lui permettre de s’exprimer. Quels sont les prémices de cette offre ? Comment en favoriser le développement ? Concrètement, nous voici appelés à l’entraide : comment établir des réseaux ? Comment produire et partager des ressources ? Ensemble, nous pouvons faire de cette journée un point de départ.

Jean HASSENFORDER.

(1) Hassenforder (Jean). La dynamique de Témoins. Témoins, N° 141, mai-juin 2003, p.4-14. Dans le dernier numéro du magazine, histoire, orientations et activité de Témoins depuis sa création en 1986.
(2) Le récent sondage publié par La Croix, le 15 aôut 2006, témoigne de la poursuite du déclin de la pratique dominicale. Voir : La messe dominicale. Un article de La Croix sur les évolutions de laz pratique religieuse Lire l’article
(3) Bréchon (Pierre). Les attitudes religieuses en France.Quelles recompositions en cours ? Archives de sciences sociales des religions. N° 109, janvier-mars 2000, p.11-29. Les « sans religion » constituent la moitié ou plus de l’échantillon en dessous de 50 ans.
(4) Hourdin (Georges). Le vieil homme et l’Eglise. Desclée de Brouwer, 1998. Après 1945, Georges Hourdin fonde un groupe de presse innovant : La Vie Télérama . Dans ce cri d’alarme, il ose écrire : « L’Eglise catholique de France risque de disparaître. C’est tout au moins ce que nous dit l’analyse des faits ».
(5) Mendras (Henri). La seconde Révolution Française.1965-1984. Gallimard, 1988 (1994. folio essais).
(6) Hervieu-Léger (Danièle. Le pèlerin et le converti. La religion en mouvement. Flammarion, 1999. Voir aussi : Hervieu Léger (Danièle). L’autonomie croyante. Questions pour les Eglises. Témoins, N° 134, mars-avril 2001, p.12-13.
(7) Fath (Sébastien). Du ghetto au réseau. Le protestantisme évangélique en France 1800-2005. Labor et Fides, 2005.
(8) Murray (Stuart). Church planting. Laying foundations . Paternoster Press, 2000 ; (Présentation : Hassenforder (Jean). Vers une nouvelle génération d’églises ; www.temoins.com et IDEA, N°64, juillet 2003, p.1-4.
(9) Moynagh (Michael). Changing world. Changing church. Monarch books, 2001. Traduit et publié en français : Moynagh (Michael). L’Eglise autrement. Les voies du changement . Empreinte Temps présent, 2003. (Article présentant ce livre : Hassenforder (Jean). A monde qui change, Eglise qui change. Lire l’article . Extraits dans : Parvis, N°18, juin 2003, p.20-22).
(10) Roof (Wade Clark). Spiritual seeking in the united States. Archives des sciences sociales des religions, N)109, janvier-mars 2000, p.49-66.
(11) Avec des livres sur l’innovation dans l’éducation et le développement des bibliothèques publiques.
(12) Jamieson (Alan). A churchless faith. SPCK, 2002. Jamieson (Alan). Journey in faith. SPCK, 2004 Recherche d’un sociologue néo-zélandais auprès de chrétiens évangéliques ayant quitté les églises constituées.
(13) A lire : Moynagh (Michael). Emergingchurch.intro. Monarch books, 2004. L’ensemble de cette orientation est présentée dans : Hassenforder (Jean) Le courant de l’Eglise émergente. Un état d’esprit. Un processus Lire l’article . Extraits dans : Faire Eglise autrement. Un monde autre, des communautés autres. Parvis. Hors Série. N°13, 1er semestre 2005, p.14-19.
(14) McLaren (Brian) Generous orthodoxy. Zondervan, 2004 . Présentation : Hassenforder (Jean). Une théologie pour l’Eglise émergente. Qu’est-ce qu’une orthodoxie généreuse selon Brian McLaren ? Lire l’article
(15) Nouvelles formes d’Eglise. Perspectives Missionnaires. Revue protestante de missiologie, 2006/1, N°51 (avec un article comparatif : Hassenforder (Jean).Une perspective comparative sur l’Eglise émergente. La Grande-Bretagne en mouvement. La France en attente, p.42-51 (site de Témoins : Lire l’article)
(16) Muller (C), Bertrand (J.R.). Où sont passés les catholiques ? Une géographie des catholiques en France. Desclée de Brouwer, 2002.
(17) Depuis les initiatives qui ont anticipé sur Vatican II (Les mouvements de jeunesse , les prêtres ouvriers) jusqu’aux groupes qui veulent rester fidèles aujourd’hui à cet esprit (Jonas, Parvis…). Citons un recueil d’initiatives communautaires oeuvrant en ce sens : Faire Eglise autrement. Un monde autre. Des communautés autres. Parvis, hors série, N°13, 1er semestre 2005. On peut y ajouter le processus engagé dans le diocèse de Poitiers pour remplacer les structures paroissiales traditionnelles par des communautés locales animées par des conseils de laïcs.
(18) Pelletier (Denis). La crise catholique. Religion, société, politique en France (1965-1978). Payot, 2002. Ce livre couvre une période charnière. S’il couvre les changements et les innovations intervenues dans la période issue de 1968 (les communautés de base, Boquen..), il présente un champs bien plus vaste (des groupes Marcel Legault à Taizé).
(19) Landron (Olivier). Les communautés nouvelles. Nouveaux visages du catholicisme français. Paris, Cerf, 2004. Une histoire des communautés nombreuses et variées issues du Renouveau charismatique.
(20) Au cours des dernières années, Evangile et Culture , groupe de travail de l’Alliance Evangélique, a joué un rôle pionnier dans la promotion de l’Eglise émergente en France . Evangile et Culture, avec la collaboration de Témoins, a ainsi invité à Paris : Stuart Murray, Michael Moynagh, Brian McLaren. Signalons aussi le récent dossier sur l’Eglise émergente dans : Construire ensemble, N°91, mars 2007.
(21) Hassenforder (Jean). L’Eglise émergente en France. Pourquoi, Comment ? Propositions pour un débat et une réflexion collective Lire l’article
(22) Mendras (Henri), Duboys Fresney (Laurence). Français, comme vous avez changé ! Histoire des français depuis 1945. Tallandier, 2004 (p.253).

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Les diverses représentations en mouvement et en tension. Bilan des rencontres de la matinée par Gabriel Monet

Faire une synthèse de ce qui s’est dit et vécu au cours de la matinée de réflexion sur l’innovation dans les Eglises à l’occasion de la journée organisée par l’association Témoins est un défi impossible au vu de la richesse et de la profondeur des échanges. Toujours est-il que l’innovation est bien présente dans les Eglises en France comment en ont attesté les nombreux témoignages. Elle touche notamment à trois dimensions de la vie des Eglises : les formes des cultes, la relation entre chrétiens, et la présence au monde. On trouve donc là trois modes de relation, vis-à-vis de Dieu, des croyants et du monde. A n’en pas douter, l’innovation a une finalité qui est d’ordre relationnelle !

Au delà de cette remarque préalable, il semble que l’on puisse faire ressortir dans une vision dialectique un certain nombre de tensions qui contribuent à délimiter le champ des enjeux de l’innovation dans les Eglises. Ce sont du reste plus des questions que des réponses :

Fond / Forme
L’innovation touche-t-elle les formes de la vie de l’Eglise ou ses fondements. Il semble que le plus souvent ce soit les formes que l’on souhaite changer, mais l’innovation des pratiques d’Eglise implique immanquablement innovation de la théologie, car changer les structures induit un changement de fond.

Dans l’Eglise / Hors l’Eglise
L’innovation se fait-elle (ou doit-elle se faire) à l’intérieur des structures ecclésiastiques ou en dehors de celles-ci ? Des innovations ont lieu d’une part dans les Eglises existantes, les faisant évoluer et s’adapter, mais d’autres innovation contribuent à la création de nouvelles Eglises, ou de structures para-ecclésiastiques. Cela pose la question de l’articulation entre institution et innovation, et aussi celle de la territorialité.

Convergence / Divergence
L’innovation contribue-t-elle à l’unité ou à la diversité ? D’un côté il y a le besoin de faire converger les initiatives et les innovations. D’un autre côté, l’innovation permet l’élargissement, une certaine diversité, et au final une certaine divergence. Comme l’exprime Esaïe 54.2, élargir l’espace de sa tente implique d’affermir ses pieux ! Voilà une tension fructueuse…

Radicalité du changement / Micro-changement
L’innovation concerne-t-elle quelques petites touches par-ci par-là, ou bien amène-t-elle des changements radicaux ?

Valeur ajoutée /valeur remplacée
L’innovation vient-elle comme un plus par rapport à ce qui existe ou est-elle destinée à remplacer ce qui existe ?

Base / Hiérarchie
D’où part l’innovation ? De la base ou de la hiérarchie ? Les expériences montrent que si les initiatives peuvent venir de part et d’autre, les freins ne sont pas non plus toujours là où on les attendrait.

Individu / Communauté
L’innovation est-elle le fruit d’initiatives personnelles ou de projets collectifs et communautaires ? Si le besoin d’un « vivre ensemble » est indéniable, on ne peut non plus ignorer ni les différences individuelles, ni l’importance d’un certain leadership liés à des individualités.

Au final, ce n’est pas l’innovation pour l’innovation qui est recherchée mais bien l’innovation au service d’un objectif. Certes, d’une certaine manière, il n’y a rien de nouveau sous le soleil, comme le dit Salomon… sauf à considérer que la nouveauté sera présente là où l’on répondra à un besoin ou une souffrance. Puisse le souffle créateur de l’Esprit contribuer à rendre toutes choses nouvelles en son temps !

Gabriel Monet
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Le vécu d’une église de maison. Maguy et Daniel Schaerer

Au départ, une frustration douloureuse : malgré un témoignage et des initiatives personnelles bénies, nous ne parvenons pas à transmettre à nos contemporains la vie nouvelle que Dieu nous donne en Jésus. Certes, quelques-uns sont touchés, mais ils n’y entrent pas pleinement. Puis, une direction donnée par le Seigneur : « ouvrez votre maison aux non-croyants » !
Témoignage de Maguy Schaerer
Nous sommes trois couples, avec cette même motivation, et nous commençons à nous réunir et à prier dans cette perspective. Et Dieu commence à nous envoyer du monde par l’intermédiaire d’autres chrétiens. Nous partageons nos témoignages respectifs. La première personne s’ouvre au Seigneur. Par le bouche-à-oreille, d’autres s’ajoutent et découvrent l’amour de Dieu pour eux. Nous constatons que la présence du Seigneur et son amour vécu dans le groupe sont un témoignage puissant et saisissant pour les nouveaux arrivés.
Nous vivons des moments de convivialité, d’amitié grandissante, de reconnaissance et de louange à notre Seigneur. Nous avons des partages interactifs sur des passages et des thèmes bibliques (conversion, repentance, pardon…). Nous prions les uns pour les autres, non seulement les chrétiens de longue date, mais aussi ceux qui sont en recherche. Dieu répond. Les témoignages alimentent également nos rencontres ! Nos nouveaux amis découvrent le Seigneur vivant ! Ils en parlent autour d’eux et commencent à se préoccuper de ceux qui sont loin de Dieu et qui souffrent. Le groupe s’étoffe : adultes, enfants, ados, personnes âgées prennent plaisir à vivre cette fraternité, non seulement lors des réunions, mais aussi dans le quotidien de la vie.

Arrive le moment où il devient difficile de conserver le caractère très personnel et convivial de nos rencontres. Nous essaimons en trois groupes qui ont l’occasion de se retrouver au cours de rencontres communes.

Les enfants qui avaient, au fil des rencontres, développé une belle amitié nous expriment leur déception, lorsqu’ils apprennent que les mamans décident de se réunir en après-midi, pendant que les enfants sont à l’école. Ce sont surtout des fillettes qui réalisent qu’elles ne pourront pas continuer à vivre ces moments d’amitié autour de jeux, de bricolage, de chorégraphies et souhaitent avoir leur propre réunion ! Notre fille, l’aînée d’entre elles a sur le coeur d’ajouter à leurs activités un moment de partage spirituel qu’elle voudrait animer elle-même.

Nous sommes totalement inexpérimentés dans ce domaine… Néanmoins, en priant à ce sujet, nous comprenons qu’il s’agit d’une impulsion du St Esprit à laquelle nous devons répondre par l’affirmative. Les fillettes commencent donc à se retrouver le mercredi, jour de congé. Nous préparons les rencontres avec notre fille qui est la jeune animatrice (11ans). Tout en veillant à ce que les objectifs du groupe soient toujours maintenus (accueil des enfants de foyers non-croyants, évangélisation, formation de disciples et développement des dons reçus du Seigneur), nous accueillons toutes les bonnes idées quant à la mise en oeuvre du projet, car nous y discernons la créativité et la sagesse du Seigneur. Les enfants accueillis ont entre 7 et 10 ans; ils invitent eux-mêmes leurs amis qui ne connaissent pas Jésus. Nous prenons grand soin de développer une relation de confiance avec les parents, qui se transforme, avec certains d’entre eux, en une relation d’amitié. Un an plus tard, nous sommes dépassés par le nombre et l’écart de mentalité entre les plus jeunes et ceux qui sont maintenant au collège. Nous partageons le groupe en deux et adaptons le programme en fonction des âges. Le mouvement continue et se trouve être un réel encouragement en milieu scolaire pour ceux qui veulent marcher avec le Seigneur. Les mois et les années passent, les enfants grandissent, et nous nous retrouvons avec un groupe d’ados, un groupe de pré-ados et un groupe d’enfants ! Deux des jeunes filles viennent spontanément proposer à la nôtre de la remplacer auprès des plus jeunes. Pour leur part, elles continuent à fréquenter le groupe de leur âge où elles reçoivent pour elles-mêmes. Par la suite, d’autres enfants ayant goûté à cette bénédiction expriment le désir de reproduire la même dynamique chez eux, avec l’aide de leurs parents.

C’est ainsi que le Seigneur nous a permis de semer auprès de beaucoup d’enfants de jeunes et de parents. Tous n’ont pas accueilli le message. Le plus réjouissant est lorsque les parents et les enfants s’ouvrent simultanément au Seigneur, que toute la famille est transformée et devient un lieu de vie et de lumière dans la société.
Maguy Schaerer

Maguy a relaté la part des enfants dans cette expérience innovante. À sa suite, Daniel Schaerer a brièvement situé cette expérience. Il nous la décrit dans son ensemble au sein de la rubrique « témoins d’innovation ». Lire l’article

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Miettes théologiques… à propos de l’église émergente. Gabriel Monet

Face aux mutations socio-religieuses de nos sociétés occidentales, et pour répondre aux aspirations d’un certain nombre de croyants à adapter le vécu de la foi à la culture contemporaine, le plus souvent postmoderne, on a vu apparaître ces dernières années ce qu’on appelle de plus en plus des « Eglises émergentes ». Ces changements et évolutions de la société appellent de nouvelles formes d’expression de foi, une nouvelle manière de « faire Eglise ». Ainsi, de nombreuses innovations ont surgi et un mouvement foisonnant s’est développé dans des directions variées qui témoignent d’une grande créativité.

Si les pratiques, les valeurs et les doctrines des Eglises émergentes offrent une grande variété, elles prennent parfois des orientations très différentes. On peut néanmoins distinguer un certain nombre d’éléments qui peuvent contribuer à décrire les Eglises émergentes : une intention missionnaire de partage avec la culture environnante ; une emphase sur une approche narrative de la foi et de la Bible ; une « orthodoxie généreuse » (Brian McLaren, Generous Orthodoxy) qui prône l’ouverture et souvent le dépassement des frontières doctrinales et dénominationelles ; un christocentrisme contribuant à un engagement de vie à la ressemblance de Christ et un message de réconciliation entre Dieu, l’être humain et la création ; une authenticité qui favorise le partage d’expériences et les interactions.

Les Eglises émergentes développent le plus souvent une approche flexible de la foi, la voyant plus comme un cheminement que comme une destination. L’utilisation de moyens de communication modernes tels que l’Internet, l’image, la vidéo y sont fréquents. La créativité est prédominante ainsi qu’une vision holistique du rôle de l’Eglise dans la société.

Plusieurs enjeux paraissent être en lien avec l’émergence de ces nouvelles formes d’Eglises. Le premier concerne la définition de ce qu’on appelle les Eglises émergentes. Ce terme est de plus en plus utilisé mais a-t-il un sens et recoupe-t-il des réalités connexes ? Tout le monde parle-t-il de la même chose quand on évoque les Eglises émergentes ? Un deuxième enjeu touche à la crédibilité du courant des Eglises émergentes. Est-ce simplement une mode ou un mouvement de fond ? Un troisième enjeu peut amener à aborder la question de l’adaptation des Eglises à la culture postmoderne environnante. L’Eglise doit-elle être liée à la culture et jusqu’où ? Si les Eglises émergentes se réclament d’une adaptation à la postmodernité, il reste à définir ce qu’on entend par postmodernité et à envisager ses implications pour le vécu de la foi. Un quatrième enjeu concerne la spécificité française : s’il semble que des Eglises émergentes voient le jour dans de nombreux pays européens, qu’en est-il du développement des Eglises émergentes en France ? Il semble que l’hexagone reste en retrait si ce n’est dans l’attente. Alors est-ce exact et comment expliquer cela ? Enfin, et c’est sur ce dernier enjeu que nous voulons maintenant esquisser quelques pistes ; il touche aux fondements théologiques des Eglises émergentes. Si ces Eglises dites « émergentes » se sont avant tout développées de façon pragmatique et si la pratique a souvent précédé la réflexion théologique, quels valeurs bibliques et fondements théologiques sous-tendent l’émergence de telles Eglises et quelle est leur pertinence ?

Une Eglise incarnationnelle

« La Parole est devenue chair et elle a habité parmi nous » (Jean 1.14). L’incarnation de Jésus est évidemment centrale dans la foi chrétienne et elle a une portée non négligeable pour l’identité de l’Eglise. Si Jésus s’est incarné et qu’il s’est incarné dans une culture donnée, il modélise le rôle de l’Eglise qui après lui et en s’appuyant sur lui joue ce rôle d’invitation à une vie connectée avec Dieu. L’incarnation signifie entre autres que le Christ a pris part à une culture et qu’il ne peut être pleinement compris sans une prise en compte de la culture dans laquelle il a vécu.

On peut discuter le type d’inculturation qu’a été celui de Jésus, et celui qui l’a fait de la manière la plus marquante reste probablement Richard Niebuhr dans son livre Christ and Culture. Il évoque cinq options, parfois contradictoire, parfois complémentaires : Jésus a-t-il condamné la culture ? Jésus a-t-il accepté la culture ? Jésus a-t-il été au dessus de la culture ? Jésus a-t-il souhaité maintenir un paradoxe avec la culture ? Jésus a-t-il désiré enrichir la culture ? On ne va pas ici discuter en détails les cinq items proposés par Niebuhr et chercher à savoir si plus de cinquante ans après ces propositions, elles ne méritent pas d’être amendée. L’Eglise doit-elle est porteuse d’une contre-culture ? Le modèle d’incarnation que le Christ nous propose nous montre en tous cas que si une contre-culture doit advenir elle doit être précédée par un embrassement de condition de l’autre, qui permettra l’interaction.

Voilà me semble-t-il le défi de l’Eglise aujourd’hui : être immergée dans la culture de sa génération, non pour en épouser tous les styles, mais pour contribuer à la transformer, et accompagner les personnes dans un itinéraire de vie qui les amènera à réfléchir et à voir les choses sous d’autres angles. Pour partager avec nos contemporains, il est nécessaire de les rejoindre dans leur mode de pensée, donner et recevoir, et accepter que l’on puisse aller ensemble vers une transformation mutuelle.

L’incarnation a été le point de départ de l’action du Christ ici-bas. Jésus est entré si profondément dans la culture humaine qu’il a subi la mort du fait de cette culture. S’engager par amour dans une culture conduit à des processus d’incarnation.

Mais après l’incarnation, il y a donc le sacrifice… et la résurrection ! Ne faut-il pas savoir mourir à l’Eglise qui nous a bercés pour laisser place à de nouvelles formes du vivre ensemble chrétien. Ce principe est enraciné dans la mort et la résurrection de Jésus. Une mort et une résurrection sont nécessaires pour que de nouvelles formes de vie émergent. Il nous faut mourir à nos conceptions préconçues de l’Eglise et à celles dont nous avons hérité pour faire de la place aux conceptions nouvelles. Rendre service dans la communauté efface la mentalité nous/eux de part et d’autre. Il est difficile de renoncer aux choses avec lesquelles nous avons grandi, mais cette expérience « sacrificielle du vendredi saint » est incontournable pour libérer la créativité. Il faut pouvoir dire que notre forme actuelle d’Eglise ne correspond peut-être pas aux besoins de la majorité de nos contemporains. Le parcours mental pour y arriver peut s’avérer très dur pour certains, c’est pourquoi le sacrifice est un principe clef qui découle de l’incarnation, mais rien ne sera possible tant que nous ne serons pas prêts à remettre en question nos pratiques traditionnelles.

Jésus a laissé à ses disciples la mission de faire d’autres disciples. L’exemple de Jésus est appelé à se reproduire dans la vie des Eglises. C’est ce que montre le livre des Actes et ce qui s’observe dans l’Histoire. Mais cette vie de Jésus ne se reproduit pas sous forme de clones, dans l’uniformité. Elle se reproduit avec des caractères originaux, propres à chaque disciple. La reproduction nécessite la mutation adaptative et non pas le clonage. Le brassage de patrimoines génétiques est essentiel et produit à la fois continuité et innovation. De même, les Eglises émergentes sont des reproductions de la vie de Jésus, mais avec chacune des particularités, des spécificités propres à leurs contextes culturels et humains.

Un Eglise missionnelle

Ce terme a émerge dans les années 1990 (Darel Guder, The missional church) avec plusieurs intentions. D’abord, il reflète une sorte d’embarras à propos du terme missionnaire tellement connoté et pas toujours positivement. Ensuite, il s’est voulu porteur d’une troisième voie entre libéraux et conservateurs. En simplifiant certainement trop le tableau, les conservateurs sont concernés principalement par le Sauveur personnel, initiateur de la conversion, et par un enracinement dans la Bible, sans forcément désirer prendre en compte le contexte dans lequel la foi est vécue. A l’inverse les libéraux mettent l’accent sur l’adaptation au contexte et à la rationalité ambiante. Mais surtout ce terme est porteur d’une vision de la missiologie. En effet, on voit le plus souvent la missiologie comme étant une branche de la théologie. Or des auteurs comme David Bosch, Leslie Newbigin ou Vincent Donovan ont défendu l’idée inverse : que la théologie, et notamment l’ecclésiologie, est une sous-partie de la missiologie.

Cela nous amène à repenser les rapports entre Royaume de Dieu, Eglise de Dieu et la Mission de Dieu. On parle toujours de la mission de l’Eglise, mais ne serait-il pas plus juste de parler de la mission de Dieu, dans laquelle l’Eglise est un agent. L’Eglise devient liquide (Pete Ward, Liquid Church). On sort du schéma : « Venez à nous » pour entrer dans un schéma : « Va », expression si présente dans la Bible.

Le but de la mission de Dieu, c’est l’irruption du royaume de Dieu (dans une double dimension du déjà et du pas encore). L’Eglise ne devient qu’un moyen (parmi d’autres) pour que dans le cadre de la mission de Dieu, le royaume puisse émerger. La mission n’est pas accomplie lorsque des églises existent, mais tant mieux si de nouvelles formes d’église voient le jour et contribuent à faire émerger le royaume de Dieu, c’est-à-dire à faire grandir par le Saint-Esprit la présence de Christ en chacun, mais aussi dans la société, les relations et les valeurs qui la sous-tendent.

Il n’y a donc plus de dichotomie entre évangélisation et action sociale. Il n’y a plus de missionnaires ou de champ missionnaires puisque tous les chrétiens sont missionnaires, et partout où se trouve un chrétien devient un champ missionnaire (ce n’est plus une question géographique, mais relationnelle). L’Eglise n’existe plus pour elle-même mais pour Dieu bien sûr, et pour le monde.

Une Eglise plurielle

L’Eglise plurielle, est d’abord un principe théologique. « On ne met pas du vin nouveau dans de vieilles outres » ; il était donc prévu que pour accueillir le vin nouveau, de nouvelles outres soient utilisées. C’est du reste inhérent à la personne de Dieu qui est communauté (Gilbert Bilezikian, Solitaire ou solidaire), qui se laisse voir sous des figures différentes : Père, Fils, Saint-Esprit… donc une réalité multifacette. Les images bibliques dans la Bible montrent que l’Eglise ou les Eglises peuvent avoir des formes différentes pour répondre à des besoins différents (forteresse, sel de la terre, corps du Christ, peuple de Dieu, etc.).

L’Eglise plurielle, c’est aussi une réalité historique. A commencer par l’histoire biblique : à la pentecôte, les auditeurs du discours de Pierre ont chacun entendu ce discours dans leur langue. Du reste, les modèles d’Eglise de Jérusalem et d’Antioche sont très différents. Ceci et également vrai au niveau de l’histoire de l’Eglise postbiblique : les Eglises des différentes périodes ont été très différentes.

L’Eglise plurielle, c’est enfin un besoin pragmatique. La diversité culturelle, l’individualisme et l’émergence de l’autonomie du sujet, la multiplication des moyens de communication… font que pour mieux permettre aux uns et aux autres de vivre leur foi il est utile que cohabitent des Eglises de sensibilités différentes. A un monde multipolaire, une église multipolaire… parce qu’une église unie n’est pas uniforme !

Conclusion

L’église est sans cesse émergente… Son émergence et sa transformation continuelle sont inhérente à son identité. A condition, il est vrai (et l’histoire n’a pas toujours été dans ce sens) de ne jamais oublier que l’Eglise n’est pas une fin, mais un moyen. Un moyen qui sait s’adapter pour mieux répondre à son objectif qui est de contribuer à ce que le plus grand nombre puisse être dans les conditions d’une relation avec Dieu.

Gabriel Monet
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Questions sociologiques et regard marketing à propos du devenir des églises émergentes. Alain Gubert

Cet après-midi, la réflexion qui habite chacun d’entre nous s’appuie sur un phénomène qui interroge tout observateur du paysage religieux français : la baisse importante de fréquentation des églises traditionnelles. Au-delà du froid constat qu’impose la lecture des chiffres révélés par les sondages, nous désirons comprendre ce phénomène et, au-delà, tenter de poser quelques repères structurants de potentielles réponses pertinentes.

Au préalable, pour faciliter l’analyse, schématisons l’activité de la sphère religieuse comme la rencontre d’une offre et d’une demande de religieux, sur le marché du religieux. Par ailleurs, nous sommes ici tous d’accord pour circonscrire notre champ de réflexion au « comment ?» de l’annonce de l’évangile ; le « quoi ? », le message de l’évangile, lui, étant invariant.

Dans cette rencontre de l’offre et de la demande c’est du côté de la « demande » que se produit un « décrochage », comme un « divorce », sur fond de « seconde révolution française » bien décrit par le sociologue Henri Mendras.
La « fracture » située dans la seconde moitié des années 60, se caractérise par un changement radical dans la façon dont l’individu se vit et se situe dans son environnement.
Ainsi la modernité, ensemencée durant le siècle des lumières, semble trouver sa pleine éclosion dans la revendication, par l’individu, d’une pleine autonomie (Autos nomos : l’homme est une loi (nomos) à lui-même (autos)). L’autonomie remplace l’hétéronomie (eteros nomos) ; l’indépendance balaye la dépendance aux institutions, qu’elles soient publiques ou religieuses… L’« horizontalité » remplace la « verticalité ».
Cette indépendance rend caduque la réception traditionnelle de la foi par la cellule familiale. La foi qui se transmettait façon descendante, entre générations, s’acquiert aujourd’hui prioritairement par un choix autonome, personnel, intime… L’acceptation passive d’une réponse standard est supplantée par une démarche personnelle, donc singulière.
Par ailleurs, une attente religieuse au départ homogène, globale et bien identifiée, est remplacée par un foisonnement d’attentes individuelles et particulières.
À ce moment du propos, il est important d’en préciser le contour en rappelant que la société contemporaine se caractérise comme un assemblage d’individus aux comportements de plus en plus hétérogènes. Ainsi plusieurs « segments » de population se juxtaposent, segments aux caractéristiques et comportements différents. Si certains d’entre eux sont toujours en phase avec la proposition « traditionnelle » des églises en place, d’autres, semble-t-il de plus en plus nombreux, ont des attentes non satisfaites par ces mêmes propositions. C’est vers ces derniers que nous sommes tournés.

Singularité, autonomie, horizontalité fondent ainsi une nouvelle relation de la demande à l’égard de l’offre. Deux points forts en découlent :
• Basculement de l’initiative de la relation : c’est la personne, le chercheur « seeker » de spiritualité qui sollicite l’institution parmi d’autres identifiées comme réponses potentielles accessibles ;
• L’institution traditionnelle ne conserve sa pertinence que par sa capacité à réponde de façon singulière aux attentes exprimées également de façon singulière.

Mais la prétention, la capacité à répondre aux attentes exprimées, passe obligatoirement par leur bonne connaissance et compréhension.
Sans en explorer toute leur complexité, ce qui prendrait beaucoup de temps, et qui par ailleurs est accessible dans les travaux de sociologues des religions tels Danièle Hervieu Léger, Françoise Champion ou Jean Paul Willaime, rappelons rapidement les quelques traits saillants marquant le comportement du « chercheur de spiritualité ». Il est, ici, intéressant de noter la convergence d’analyse des professionnels des sciences humaines avec nombre d’hommes d’églises, notamment catholiques, tels les dominicains André Gouzes ou Christian Duquoc, le théologien Hans Küng.

Retenons que le comportement de l’individu est de plus en plus marqué par :
• Des aspirations spirituelles maintenues et que certains disent croissantes : s’il y a perte au niveau des pratiques religieuses tout indique que les aspirations spirituelles ne sont pas en recul mais bien vivantes ; on constate aujourd’hui « la dissémination des phénomènes de croyance »… « il y a du religieux partout ». Religieux « à la carte », religieux « flottant », croyances « relatives », nouvelles élaborations syncrétiques »
Autrefois on avait imaginé que l’avancée de la rationalité allait disqualifier les croyances traditionnelles, mais on s’aperçoit aujourd’hui qu’en fait, si la modernité entraîne l’extension d’une rationalité scientifique et technique “désenchantée”, dans le même temps, en générant de grands changements, elle développe d’énormes incertitudes qui favorisent un maintien et même un extraordinaire développement des croyances. (Danièle Hervieu Léger : Le pèlerin et le converti)
Ces croyances se développent désormais sur un mode extraordinairement individualiste et subjectif. Elles accompagnent le processus d’affirmation de l’individu.
Fondamentalement, ce qui est jugé important, c’est l’engagement personnel du croyant, c’est la manière dont il met en oeuvre une quête de sens personnelle, c’est l’authenticité de sa recherche spirituelle.
L’idée d’une conformité obligatoire à des vérités à croire qui seraient prescrites par les grandes institutions apparaît de plus en plus inacceptable.
Le fait nouveau, c’est donc que les grandes églises sont de moins en moins en mesure de fournir des canaux, des dispositifs organisateurs de ces croyances (interview de Danièle Hervieu Léger accordé à Témoins Juin 2003)
• Une maturité de réflexion, forgée par un contexte psychologique de vie exigeant ;
• Une recherche d’émotion, de plaisir, de fête, de convivialité ;
• Une attente de dialogue qui lui donne l’impression d’être respecté dans son unicité. L’individu use de sa liberté et revendique que la réponse qu’on lui propose soit en adéquation avec ses goût et ses besoins particuliers. L’offre de religieux, en parallèle avec celle du marché des biens de consommation, devra tendre vers une succession de niches, de réponses individualisées ;
• Un besoin de reconnaissance. Paradoxalement la personnalisation de la réponse « customization » (terme formé à partir du verbe anglo-saxon customize signifiant créer sur-mesure, personnaliser), s’insère dans une logique de groupe offrant le sentiment rassurant de partager une communauté d’intérêts et d’émotions. Le choix de l’individu est ici autant façonné par l’existence d’un rapport social que par le contenu doctrinal proposé. Dichotomie du comportement de l’individu marqué par le besoin de respect de son individualité et de partage d’affinités et de références ;
• Un désir de relationnel au regard d’une société marquée par l’individualisme mais où se marque aussi un besoin d’interaction croissante, un désir très fort de situation relationnelles ;
• Une volonté d’être acteur de sa vie tout en recherchant la sécurité d’une prise en charge qui l’affranchisse de risques ;

Après ce « portrait robot », incomplet et exécuté à la serpe, que faire ? Au-delà de l’église « renouvelée », ouverte aux innovations, aller vers une église « réinventée ». Que caractérise un tel « aggiornamento » ? l’offre
• Repenser, réformer, re-former notre vocabulaire, nos structures, nos leadership, nos styles, nos liturgies, notre communication pour aller vers une formulation en phase avec le « langage culturel » de nos interlocuteurs. Sortir de nos réflexes marqués par une culture datée pour accompagner les nouveaux courants culturels rencontrés ;
• L’église ne se situe plus comme une proposition « a priori » à laquelle on adhère, mais comme une réponse pertinente au « service » des attentes perçues ;
• L’église se devra d’être « ouverte » pour s’adapter à la ponctualité des questionnements qui traversent la vie de chacun et ne pas enfermer la relation dans un a priori durable ;
• La complexité des attentes de nos contemporains devrait inciter la communauté locale à s’ouvrir à des problématiques jusqu’ici peu trop peu « habitées » telles que les questions d’éthique, d’écologie, de travail, d’éducation, de psychologie, de relation conjugale… « Aider les gens à trouver un chemin dans la vie en leur offrant une source d’identité et en développant des valeurs dignes d’être vécues : Michael Moynag : Changing world, changing church »

Cette ré-imagination de l’église n’aboutit pas à un modèle mais à autant de modèles que d’attentes singulières identifiées. « Les expérimentations sont l’atelier du Saint Esprit » : Michael Moynagh : emergingchurch.intro » ; C’est d’abord un état d’esprit.

• L’église émergente est la manifestation d’une église « missionnelle » qui reconnaît l’action de l’Esprit Saint, déjà à l’œuvre chez les gens rencontrés, et développe d’une attitude d’amour qui reconnaît l’autre tel qu’il est en l’aimant pour lui-même ; ces personnes détermineront ensuite si elles désirent former une communauté chrétienne et dans quels termes.
• L’église émergente s’établit sur une annonce de l’évangile en phase avec la culture du milieu concerné. Elle s’adapte aux différentes « niches culturelles » présentes maintenant dans notre société et en rapport avec le travail, les loisirs, les médias, les classes d’âges, origines nationales ou autres particularismes ;
• Elle manifeste une forte dimension relationnelle dans la mouvance d’un Dieu trinitaire
• Elle manifeste beaucoup créativité dans l’invention de nouveaux modes d’expression de la foi
• Toutefois cette multiplicité et complexité des attentes ne peut trouver des réponses suffisantes dans la seule communauté locale ; L’accessibilité à des réponses adaptées suppose la mise en réseau des ministères et compétences ;
• Elle constitue une structure ouverte offrant des espaces accueillant le dissentiment ;
• Ces communautés sont elles même en relation les unes avec les autres au travers d’un réseau. Les églises locales s’unissent ainsi dans une dimension d’église plus large.
• Ces réseaux permettent également un partage des expressions des communautés entre elles et leur donnent accès à une grande diversité de ressources ;
• Allant ensemble à l’essentiel de la foi, à travers la communion fraternelle, la prière, l’étude de la Parole biblique, ces communautés s’établissent sur un consensus commun qui s’alimente également par le partage de ressources communes et des ministères, par la participation à des manifestations d’ensemble, tout en continuant à puiser dans les richesses des églises établies …
• La légitimité de ce nouveau « milieu d’églises » s’appuie sur une communion interne, entre les communautés et membres du réseau et externe, c’est à dire une communion avec les autres églises déjà existantes.

Encore une fois, il ne s’agit pas ici et maintenant de faire un exposé exhaustif de l’analyse de la situation et des réponses potentielles. Notre démarche a été de modestement nous arrêter sur le partage d’un même constat et sur la mise en commun de notre motivation à contribuer à une avancée positive.
Cette journée met aussi certainement en évidence la nécessité, d’une part de s’inspirer plus avant du travail déjà accompli par nos amis anglo-saxons, d’autre part de mettre en commun nos énergies, chacun pouvant se dire « nous sommes plus intelligents que moi ! ».
Je vous propose de nous contenter aujourd’hui de cet « avant-propos », espérant que son partage soit créatif, productif d’un possible différent et inattendu, en un mot émergent !

« Une question infinie doit avoir une réponse infinie, car aucune autre ne peut la résoudre » Thomas Traherne (poète 17°)

Alain Gubert

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Nous avons rencontré des Témoins. Henrik Lindell

Une cinquantaine de personnes ont bravé la grève dans les transports pour venir à la rencontre de Témoins le 20 octobre. C’est un événement en soi et une promesse.

Innovation, Eglise émergente… ces termes, techniques voire théoriques, recouvrent une pratique d’évangélisation qui ne veut pas forcement dire son nom. Mais ce matin, c’était clair. Une belle louange conduite par Richard Vandenbrouque, président de Témoins, nous a d’emblée mis dans le bain. Comme si nos chants voulaient dire à peu près ceci : « Nous ne sommes pas là seulement pour discuter froidement de quelques données statistiques. Nous sommes là parce que nous aimerions que l’histoire de l’Eglise du Christ ne s’arrête pas avec nous. » Nous, c’est-à-dire des évangéliques, bien entendu, mais aussi des protestants dits historiques et beaucoup de catholiques. C’est rare, peut-être unique, de rencontrer des gens de confessions aussi différentes sous le même toit réunis dans le même esprit. L’intervention inaugurale de Jean Hassenforder (lire son texte) a confirmé en mots l’intention ressentie : Témoins défend un « christianisme de conviction et d’ouverture ». Ainsi, nous voulons « comprendre les gens d’aujourd’hui, y compris par les sciences humaines et sociales », comme l’exprime Jean Hassenforder.

À Témoins, on participe. Donc pas question de faire seulement des conférences. Ainsi une matinée de travail en groupe et un après-midi marqué par le débat. Pour l’auteur de cet article, le principal intérêt de la journée était là. Or les interventions écrites – publiées ci-contre – étaient très appréciées aussi.
Comment a-t-on donc discuté du thème de l’innovation entre chrétiens différents ? Comme sujets et propos prédominants nous avons noté la nécessité absolue de faire de l’innovation, les différences entre les générations et les cultures, les problèmes de blocages à tous les niveaux hiérarchiques, le succès des cours Alpha qui peuvent pourtant susciter certaines critiques.
Dans un des groupes, un pasteur réformé a dit « on a besoin de se remettre en cause. On n’innove pas pour innover ». Ce à quoi un pasteur évangélique a répondu : « Chez nous, le principe est parfois : que rien ne bouge ! Alors qu’on n’est pas chez les catholiques… »
Une personne de confession réformée a jugé important de discuter des tentatives d’innovations qui ont échoué. Ainsi un groupe oecuménique qui a fonctionné pendant un moment, puis s’est arrêté, faute de participants. Or ce groupe a aussi eu pour effet de susciter un intérêt chez beaucoup de catholiques pour la théologie réformée. Du coup, beaucoup de catholiques viennent aux études bibliques de l’église réformée en question. Les efforts n’aboutissent pas toujours au résultat espéré, mais ils ont toujours des conséquences inattendues. Contrairement à l’inaction. Un évangélique a cité l’église Hillsong comme un exemple intéressant de ce que l’on peut faire pour aller à la rencontre des « jeunes branchés ». Hillsong, qui vient de l’Australie, fait essentiellement de la louange avec de la musique rock et arrive ainsi à susciter un intérêt réel pour l’évangile. À Paris, ce jour-là, à Témoins, la moitié du groupe n’avait jamais entendu parler de cette Eglise-là. C’est emblématique : c’est à la fois une question de génération et aussi d’univers culturel. Qu’on le veuille ou non, les jeunes évangéliques s’expriment très différemment des vieux catholiques même si l’esprit est souvent le même.
Dans un autre groupe, nous avons surtout parlé de la question des témoignages. « Comment produire de nouvelles formes de témoignages ? » se demande un évangélique. « Le monde est en attente », insiste une personne qui travaille dans le domaine de l’évangélisation. Un prêtre catholique qui travaille entre autres comme curé évoque la multiplication de communautés sans prêtres. « Mais la hiérarchie n’en veut pas », dit-il sur un ton désabusé. « Il ne faut surtout pas demander à la hiérarchie, puisqu’on l’oblige ainsi à dire non », rétorque une catholique. Qui ajoute : « Personnellement, je peux dire que j’ai perdu une religion grâce aux communautés sans prêtres, mais j’ai retrouvé une relation. » Dans ce même groupe, on a aussi discuté des cours Alpha. Aujourd’hui, c’est la principale méthode d’évangélisation des Eglises en France. Qu’est-ce qui est si innovant dans ces cours au juste ? « En réalité, suggère un pasteur réformé, ce qui nous frappe est la liberté de la parole et l’accueil de l’autre. » Mais est-ce que la liberté de la parole et l’accueil de l’autre relèvent de l’innovation ? Qu’est-ce que cela dit de ces Eglises ? Un pasteur évangélique considère qu’il faut aller un peu plus loin. Ainsi propose-t-il de « libérer l’expression artistique » dans les Eglises.

Parmi les interventions qui ont attiré notre attention figure notamment celle du pasteur Andy Butler. Il a parlé des cours Alpha, comme une initiative d’évangélisation à partir de l’église locale. Il a insisté sur l’idée que dans ces cours, on ne met pas d’étiquette sur les gens. Il constate aussi que les participants veulent justement se situer personnellement. Le pasteur David Razzano a noté que l’innovation vient du fait qu’il y a des souffrances. Effectivement, on répond à une demande qui correspond à un besoin jusqu’alors non satisfait. Pour Gabriel Monet, membre très actif de Témoins (lire son intervention) « l’innovation est une réponse à un besoin exprimé ». En cette matière précise, qui est l’expert au juste ? « Nous le sommes tous », d’après David. Alain Gubert, autre membre de Témoins et dont l’intervention assez décapante a été très appréciée (il a notamment comparé l’offre des Eglises à l’offre des entreprises sur un marché), constate qu’il y a un décalage important entre l’attente des gens et la réponse de l’Eglise.

Finalement, « l’innovation est-ce de la valeur ajoutée ou de la valeur remplacée ? » se demande Gabriel Monet dans une de ces formules dont il a le secret. Une autre question plus difficile à traiter : « l’innovation vient-elle d’en haut ou d’en bas ? » Nous pensons qu’il est très difficile de distinguer le haut et le bas dans une église. Le pasteur n’est pas forcément le haut. Le leadership informel exercé par des personnes qui n’occupent officiellement aucun poste de responsabilité est parfois plus important que le pouvoir formel. On peut aussi se demander si une innovation qui vient d’en haut serait moins justifiée que celle qui vient d’en bas. En revanche, il est toujours utile de savoir d’où vient la demande et sa raison d’être, car c’est seulement alors que l’on peut décider si elle mérite ou non une attention particulière. Parfois, il suffit d’être au courant des besoins des gens qui habitent près de chez vous. Une des meilleures initiatives jamais réalisées en France en matière d’innovation est celle de Maguy et Daniel Schaerer. Tels les membres de l’Eglise primitive, ils ont fait venir, chez eux, dans leur salon, des centaines de personnes non-croyantes ou éloignées de l’Eglise. La plupart ont aujourd’hui la foi. Le témoignage du couple Schaerer sur ses groupes de maison et des activités parfois encadrées par des jeunes a été un des sommets de la journée.

Une partie de l’après-midi a été consacrée à l’Eglise émergente. Qu’est-ce c’est au juste ? Pour répondre convenablement à cette question, plusieurs experts en la matière ont écrit des livres entiers. Brian McLaren est le plus connu. Disons avec le pasteur Andy Butler qu’il est question de faire des ponts entre l’Eglise et la société. Historiquement, ce sont des expériences locales en Angleterre. Soutenues financièrement et moralement par l’Eglise d’Angleterre et l’Eglise méthodiste, elles ont eu le temps de se développer pour qu’un bilan ait pu avoir lieu. Ces expériences ont été décrites dans un véritable bestseller outre Manche paru en 2004 : « The Mission Shaped Church ». Il est question de nouvelles expressions au niveau local qui attire l’intérêt du public. Par exemple, une église pour les jeunes, une église café, une église où l’on fait du sport, etc. etc.. L’idée de base est simple à résumer, mais difficile à réaliser : « Si les gens ne viennent pas à l’église, il faut que l’église vienne vers eux. »
D’après Andy Butler, « l’Eglise n’a de sens que quand elle est en mission. » Ce qui renvoie à une question bien plus fondamentale que celle sur les techniques d’évangélisation : votre Eglise, votre communauté locale, est-elle vraiment en mission ? Ce jour-là, à Paris, nous étions 50 missionnaires. C’est déjà un début.

Henrik Lindell

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Dossier bibliographique

Repères bibliographiques pour une Eglise innovante. Comprendre les processus et les jalons de l’innovation à travers les livres français et étrangers.Consulter la bibliographie

Témoins. Une année de recherche. Depuis dix ans, le groupe de recherche de Témoins : « Chrétiens pour l’innovation et la recherche », analyse le rapport entre les pratiques d’Eglise et le changement culturel, les déphasages qui apparaissent, et, en regard, les innovations. Ces orientations de recherche apparaissent à travers le bilan de l’activité du groupe en 2006. Lire l’article

La dynamique de Témoins. Comment l’activité du groupe de recherche s’inscrit dans l’histoire de cette association chrétienne interconfessionnelle cherchant à associer conviction de foi et ouverture culturelle. Lire l’article

L’autonomie croyante. Perspectives pour les Eglises. Entretien avec Danièle Hervieu-Léger. Les gens n’acceptent plus que des institutions prescrivent des vérités à croire, en quelque sorte de l’extérieur, mais ils mettent en œuvre une quête de sens personnelle. Lire l’article

Le christianisme en Europe. Quelles perspectives ? La vie chrétienne en Europe s’inscrit dans une configuration spécifique comme le montre la sociologue Grace Davie dans son livre : « Europe. The exceptional case ». Lire l’article

Vers une nouvelle génération d’églises ? Quelles approches nouvelles, tant pratiques que théologiques ? La réponse de Stuart Murray, sociologue, théologien, praticien du développement. Lire l’article

A monde qui change, Eglise qui change. Michael Moynagh met en évidence les transformations sociales et culturelles et les conséquences à en tirer. Son livre a été traduit en français sous le titre : « l’Eglise autrement » (Disponible à 7ici : Tél : 01 42 61 57 77) Lire l’article

Faire Eglise. Dans une société en mutation, à côté d’une Eglise « solide », héritant des cadres du passé, se dessine une Eglise « liquide », fluide, mobile . Pete Ward nous guide dans cette recherche : comment faire Eglise autrement ? Lire l’article

Une Eglise capable de répondre au défi du changement culturel. Comment les enquêtes de Nick Spencer sur les mentalités stimulent la réflexion pastorale du théologien, Graham Tomlin, dans un livre partagé : « The responsive church ». Lire l’article

Le courant de l’Eglise émergente. Michael Moynagh met en lumière la vision théologique d’une Eglise en mission. L’Eglise émergente, c’est un état d’esprit. C’est aussi un processus. Un premier bilan et une pratique dynamique. Lire l’article

Une théologie pour l’Eglise émergente. Dans son livre : « Generous orthodoxy », Brian McLaren, pasteur innovant et théologien américain, témoigne d’un parcours au cours duquel sa foi s’est développée et enrichie au contact de milieux chrétiens différents .
Par delà les frontières, un nouvel horizon. Lire l’article

Des chrétiens d’un nouveau type. Un dossier de l’hebdomadaire « Réforme » nourri par un sondage CSA-La Croix, Réforme, met en évidence le dynamisme des chrétiens évangéliques dans le protestantisme français.

Lire en arrière plan le livre de Sébastien Fath : « Du ghetto au réseau ».Lire l’article
Un monde autre. Des communautés autres. C’est le titre d’un recueil de 17 monographies de communautés « autres » s’inscrivant pour la plupart dans un catholicisme d’inspiration conciliaire et franchement réformateur . Un éclairage sociologique et théologique. Lire l’article

Une perspective comparative sur l’Eglise émergente. La Grande-Bretagne en mouvement. La France en attente. Cet article, publié dans « Perspectives missionnaires » (2006/1) dresse un bilan. En quoi et comment des chrétiens français peuvent-ils s’inspirer de la dynamique innovante à l’œuvre en Grande-Bretagne ? Lire l’article

L’Eglise émergente en France. Pourquoi ? Comment ? Un moment dans la réflexion. La journée du 20 octobre 2007 a pour objectif de permettre une expression et une réflexion participative pour nous engager ensemble sur des pistes nouvelles. Lire l’article

La prise de conscience d’un abîme entre deux mondes…Pour une Eglise incarnationnelle et missionnelle. Comment un nouveau vécu entraîne la découverte d’un nouvel horizon. Un témoignage. Lire l’article

Références: Groupe “Recherche” Témoins

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