Aujourd’hui, reconnaître la présence de Dieu et vivre la foi au cœur de la vie

A notre époque où le monde est engagé dans une grande mutation, nous pouvons nous polariser sur les menaces qui abondent, nous replier sur notre héritage religieux et culturel. Ou bien, confiant dans la présence active d’un Dieu qui nous appelle à l’espérance, nous pouvons rendre grâce pour les merveilles qui existent dans ce monde et participer à la transformation en cours. Tout dépend de notre regard. Tout dépend de notre vision.
« Que le Dieu de l’Espérance nous remplisse de toute joie et de toute paix dans la foi pour que nous abondions en espérance par la puissance du Saint Esprit ! (Romains 15.13). Avec le théologien Jürgen Moltmann, nous « croyons à un Dieu de l’Espérance qui marche devant nous et nous précède dans le déroulement de l’histoire. C’est le message de la Bible… Le christianisme est résolument tourné vers l’avenir et invite au renouveau… la foi est chrétienne lorsqu’elle est la foi de Pâques. Avoir la foi, c’est vivre dans la présence du Christ ressuscité et tendre vers le futur Royaume de Dieu » (1). Ainsi, nous pouvons reconnaitre la présence de Dieu dans la vie du monde et dans la notre et contribuer à son œuvre.
Les articles publiés aujourd’hui sur ce site participent à cette vision.

Dans son livre : « Cyberthéologie », Antonio Spadaro nous invite à découvrir un nouveau monde : « Le web n’est pas un instrument, mais un milieu dans lequel nous vivons ». En des termes nouveaux, nous sommes appelés à vivre l’Evangile au cœur de la vie. A cet égard, un passage du livre d’Antonio Spadaro nous parait particulièrement signifiant : « Soixante dix ans après le voyage du premier train commercial sortait le roman « Jude l’obscur » (1995) de Thomas Hardy. Dans ces pages, Sue Bridehead répond ainsi à Jude qui lui demande d’aller s’asseoir dans la cathédrale : « Oui, même si en ce qui me concerne, je préférerais aller m’asseoir à la gare », répondit-elle, une trace de colère dans la voix. C’est là que se trouve la vie citadine. La Cathédrale a fait son temps ». La gare, dans ce dialogue, n’est pas un non lieu, un lieu de passage rapide, mais elle devient le centre des connections au cœur même de la ville, « milieu » symbolique également et non pas simple consigne d’un moyen de transport. Si cela est vrai en ce qui concerne la gare, ce l’est encore plus aujourd’hui en ce qui concerne le Net ». La religion a trop souvent été vécue comme un univers clos. Antonio Spadaro nous invite à « penser le christianisme à l’heure d’internet ». C’est vivre l’Evangile au cœur de la vie.

Et, de même, lorsque Frédéric de Coninck découvre la biennale 2012 d’art contemporain de Venise, il nous montre comment, au carrefour de la culture d’aujourd’hui, cette grande exposition évoque des problèmes qui soulèvent des questions spirituelles. « De toute part, les questions et attentes spirituelles des contemporains se livrent à visage découvert ». Or « les grandes religions semblent figées dans des formes rituelles qui ne font plus sens autant pour les artistes que pour la plupart des visiteurs. Et elles suscitent la méfiance parce qu’elles sont érigées en magistère moral dés qu’elles ont accédé au pouvoir ». Ainsi il y a un hiatus à combler entre foi religieuse et spiritualité.

Les jeunes générations vivent aujourd’hui dans un nouvel espace et un nouveau genre de vie. Nouvelles opportunités, mais aussi nouveaux problèmes. Et comment les églises peuvent-elles répondre aux aspirations spirituelles correspondantes alors que, bien souvent, elles sont éloignées de cette génération montante. Lorsqu’il est arrivé à la trentaine, Charly Mootien s’est interrogé sur le sens de sa vie. « Depuis mes 30 ans, je sais que j’entre dans une nouvelle phase de ma vie. Il est temps de savoir ce que je veux construire, dans quoi je veux investir, ce que je veux laisser derrière moi ». En faisant appel à son expérience riche en rencontres et à une vaste information bien choisie et bien présentée, Charly Mootien apporte un itinéraire de réflexion et de formation qui ouvre la voie d’un cheminement et d’une formation en réponse aux questions de cet âge et bien au delà…

En Suisse romande, à Lausanne, Cèdres formation, Institut de formation en théologie, christianisme et religion, vient d’organiser une série de conférences interactives permettant une réflexion sur l’Eglise émergente, les grandes églises innovantes américaines et les « fresh expressions » britanniques comme source d’inspiration pour un renouvellement des Eglises. Depuis des années, Témoins œuvre dans la même voie. Et nous nous réjouissons de cette convergence. Cèdres formation publie également une revue : « La Revue des Cèdres ». David Gonzalez nous présente ici le dernier numéro : « L’Eglise pour y venir », toute une gamme de contributions pour le renouvellement de l’Eglise.

Une des caractéristiques majeures du monde d’aujourd’hui, c’est le mouvement accéléré vers la globalisation, un mouvement croissant d’unification, qui entraine en retour de fortes crispations. Les « articles à relire » traitent de cette dimension. Dans quel contexte international la foi chrétienne se déploie-t-elle aujourd’hui ? On peut revenir à la fin de ce parcours au livre d’Antonio Spadaro qui, dans son dernier chapitre, décrit la densification des communications sur le web à l’image de la « noosphère » évoquée par Teilhard de Chardin.

Tout ce que nous venons d’évoquer en présentant cette nouvelle livraison sur le site de Témoins, peut se traduire en une expression : la foi au cœur de la vie. C’est aussi le fil conducteur de la spiritualité vécue à Témoins depuis ses débuts. Et un accent sur la communion fraternelle va de pair. Et c’est bien là une démarche en phase avec une aspiration à la convivialité et à la fraternité qui s’exprime de plus en plus à notre époque en des registres divers et des lieux variés. Nous suivons ce mouvement dans notre veille de recherche, tant ce qui apparait dans la société que ce qui s’exprime dans les Eglises. Les célébrations du 500è anniversaire de la Réforme n’ont-elles pas pris la fraternité pour emblème ? Et, tout récemment, nous découvrions un message de Dominique Lebrun, archevêque de Rouen, rapporté dans une interview du « Pèlerin » (2). Celui-ci, annonçant que les paroisses ne couvriraient plus désormais l’ensemble de ce territoire, invitait les baptisés à la mise en oeuvre d’une « fraternité de proximité ». Il « invitait les baptisés à se retrouver en petites « fraternités, une fois par semaine pendant une demie heure pour échanger quelque nouvelles et prier… Ces fraternités devraient être ouvertes. Je leur demande de dire le Notre Père… Petit à petit, je pense que, dans l’esprit du Notre Père, elles vont se remplir. Ce ne seront plus seulement les quatre personnes présentes. Ce seront les voisins, les voisines, ceux qui précisément vers qui nous sommes envoyés… ». Que Dieu, communion d’amour et puissance de vie, nous donne de vivre l’Evangile au cœur de la vie et de reconnaître le mouvement de l’Esprit dans le monde d’aujourd’hui comme dans le renouveau et la créativité des communautés chrétiennes.

Jean Hassenforder

(1) Jürgen Moltmann. De commencements en recommencements. Une dynamique d’espérance. Empreinte Temps présent, 2012 (p 109-110)
(2) http://www.pelerin.com/A-la-une/Mgr-Dominique-Lebrun-Il-n-y-aura-plus-de-paroisses-sur-tout-le-territoire

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