Retour sur le Colloque international de l’association A9 (juillet 2025)

  • Du 25 au 27 juillet 2025, s’est tenu à Bangui, dans la salle de la Caisse Nationale de Sécurité Sociale (CNSS), le colloque international de l’Association A9, organisé en partenariat avec l’Université de Bangui. Placée sous le thème « Les enjeux environnementaux en Afrique centrale : réponses, risques et avenir », cette rencontre a rassemblé des chercheurs, universitaires et acteurs de terrain venus du Tchad, du Gabon, du Congo-Brazzaville, du Cameroun et de la République centrafricaine, pour examiner les défis climatiques et écologiques qui affectent la région et explorer des pistes de développement durable.

 

  • La problématique du colloque reposait sur un constat désormais partagé : la planète connaît une surchauffe sans précédent. Les effets du changement climatique, augmentation des températures, modification du régime des pluies, perte de biodiversité, dégradation des sols se manifestent de manière visible sur le continent africain, et plus particulièrement en Afrique centrale. Cette région, pourtant riche en ressources naturelles et en écosystèmes variés, est confrontée à une dégradation rapide de son environnement : déforestation, exploitation minière non contrôlée, urbanisation accélérée, pollution des eaux et pression pastorale accrue. Les participants ont rappelé que, bien que l’Afrique soit l’un des continents les moins émetteurs de gaz à effet de serre, elle subit de façon disproportionnée les conséquences de la crise climatique. Cette injustice environnementale appelle à des réponses concertées, basées sur la coopération régionale, la solidarité et la responsabilité partagée.

 

  • La journée de travail a permis d’aborder les défis environnementaux sous divers angles : social, agricole, économique, écologique et spirituel. Les discussions ont d’abord porté sur les changements climatiques et leurs répercussions sur les sociétés, en particulier sur la sécurité alimentaire, les migrations internes et les tensions liées à la gestion des ressources. Plusieurs contributions ont insisté sur la nécessité d’élaborer des politiques d’adaptation intégrant la dimension humaine et communautaire. Un autre axe a porté sur l’agriculture et la ruralité, domaines cruciaux pour la subsistance des populations. Les échanges ont mis en évidence les stratégies locales d’adaptation et les potentialités offertes par l’agroécologie, capables de concilier productivité et préservation des écosystèmes. La réflexion s’est ensuite élargie à la place de la société civile et des institutions religieuses, considérées comme des relais essentiels de sensibilisation et d’action. Dans un contexte où la survie quotidienne domine les priorités, il a été souligné que la conscience écologique peut devenir un facteur de cohésion, de solidarité et d’espérance pour les communautés. Des initiatives sous-régionales issues du Tchad, du Congo-Brazzaville ou du Cameroun ont illustré des efforts concrets en matière de protection des forêts, de gestion durable de l’eau et de lutte contre la désertification. Ces expériences ont montré que les solutions existent, mais nécessitent une coordination renforcée entre les acteurs nationaux et régionaux.

 

  • L’un des fils conducteurs de cette rencontre a été la tension entre la survie immédiate et la préservation de l’avenir. En République centrafricaine, la question écologique se confronte aux réalités de la pauvreté et de l’instabilité. Les feux de brousse, la coupe du bois ou l’exploitation artisanale des ressources naturelles apparaissent comme des moyens de survie pour des populations fragilisées, mais contribuent à long terme à la dégradation du milieu de vie. Cette situation met en lumière un paradoxe : c’est précisément dans les contextes les plus précaires que la conscience écologique devrait se renforcer. Les participants ont insisté sur la nécessité de replacer l’écologie au cœur des priorités nationales, non comme un luxe réservé aux sociétés stables, mais comme une condition de la survie collective. La préservation de la nature ne peut être dissociée des questions de dignité humaine, de justice sociale et de paix durable.

 

  • Les travaux du colloque ont conduit à plusieurs orientations : la promotion d’une éducation environnementale adaptée aux contextes africains, le renforcement de la coopération régionale pour la gestion durable des ressources naturelles, et le soutien aux initiatives locales qui associent écologie, économie et solidarité. Ces réflexions ont également permis de réaffirmer le rôle central de A9 dans ce vaste chantier intellectuel et social. Par son engagement constant, A9 se positionne comme un cadre privilégié de dialogue, de recherche et de réflexion sur les enjeux contemporains qui touchent l’Afrique centrale. En rassemblant des acteurs issus de divers horizons, scientifiques, religieux, politiques et communautaires, l’association contribue à faire émerger des perspectives nouvelles, fondées sur la rencontre des savoirs et l’éthique de la responsabilité.

 

  • À travers ce colloque, A9 a démontré sa capacité à créer des espaces de pensée où la science rencontre la foi, et où la réflexion collective devient motrice d’action. Dans un monde en quête d’équilibre entre développement et durabilité, ce type d’initiative rappelle que l’Afrique centrale dispose des ressources humaines, spirituelles et naturelles nécessaires pour inventer une écologie du courage, une écologie enracinée dans la vie et tournée vers l’avenir. Bangui, par cette rencontre, s’est ainsi affirmée comme un lieu d’espérance, où la fragilité du monde devient le point de départ d’un nouvel engagement commun pour la Terre et pour l’humanité.

 

Rodolphe Gozegba de Bombémbé

Share This