Aimer Dieu, moi-même, mon prochain : trois commandements qui n’en font qu’un ? Ai-je la même mesure pour les pratiquer ? Jusqu’où suis-je appelé à aller dans cet amour ? Des questions importantes se dégagent de ce texte dont Jésus nous dit, dans un autre évangile (Matthieu 22, 34-40) qu’il récapitule la loi et les prophètes.  

D’habitude, les scribes, comme les pharisiens, sont présentés plutôt comme les adversaires de Jésus ; mais ici, la situation est particulière, et d’ailleurs unique dans l’ensemble des évangiles ! Ce scribe ne cherche pas à « coincer » Jésus par une question-piège, au contraire ! Il a l’air content que celui-ci ait cloué le bec aux Sadducéens, qui ne croyaient pas à la résurrection, et s’adresse visiblement au maître sans intention malveillante, pour obtenir réellement une réponse. 

 Cette réponse, elle semble d’ailleurs avoir déjà été donnée dans plusieurs passages de l’Ancien Testament, que Jésus reprend d’ailleurs explicitement : le Deutéronome 6, 4-5, et le Lévitique 19, 18 ; un Seigneur unique, et l’amour absolu : cela a été dit, qu’ajoute donc Jésus ? Ou, plutôt, quelle écoute nouvelle permet-il ? 

La Bible distingue différentes formes d’amour ; l’amour « philia » des amis, des siens, et l’amour « agapé » de tous, y compris des étrangers, dans le cadre d’une alliance qui est appelée à s’élargir ; un amour sans espoir de retour ; cet amour est au cœur de l’enseignement de Jésus : chacun est appelé à le pratiquer à sa mesure, on n’a pas tous la même force ; mais l’important est d’aller jusqu’au bout de nos forces personnelles, même si elles sont limitées. Et cet amour portera alors des fruits, témoignant d’une vraie piété (Osée 6,6),  plus agréables à Dieu que les holocaustes et les sacrifices ! (verset 33) 

Un amour qui est celui que l’on porte au Seigneur, mais aussi aux autres comme à soi-même ; ces différents commandements ne sont pas identiques, mais semblables, car également importants, indissociables, et impliquant tous la même intensité dans l’appel qui nous est adressé, un appel à aller dans l’absolu de nos forces. 

On comprend mieux, dans ce cadre, la réponse de Jésus au  scribe  (verset 34) ; l’ambiance du passage est assez pédagogique : le scribe a fait un bon commentaire après la réponse de Jésus, il est félicité comme le serait un bon élève ! Mais, si l’on fait attention, on remarque que ce compliment est tout de même nuancé : « tu n’es pas loin du royaume de Dieu »…en d’autres termes : c’est bien, mais tu peux mieux faire ? Comme si Jésus lui disait ; tu comprends déjà par ton intelligence, c’est une première étape, mais il te reste à rentrer dans la compréhension du cœur… 

Car le chemin peut être long entre la tête et le coeur, pour ce scribe, et bien d’autres, aujourd’hui comme hier ; un chemin qui, seul, peut nous amener à entrer pleinement dans ces commandements si liés entre eux. 

Alain Bourgade

Sur la base des notes prises par Gisèle McAfee.

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