L’Eloge de la gentillesse du philosophe Emmanuel Jaffelin (Ed. François Bourdin, 2011) propose une approche philosophique et historique inédite de ce thème. Pour comprendre ce qu’est la gentillesse, son ouvrage propose un voyage à travers l’histoire, du "gentilis" patricien de la noblesse romaine aux "gentilshommes" édulcorés de la renaissance, pendus (à la lanterne) lors de la révolution.

En passant par les auteurs chrétiens qui ont assimilé le "gentil" au "mécréant" plutôt qu’au "méchant" (Cf. Tertullien et Thomas d’Aquin). La différence entre la bonté et la gentillesse semble, historiquement, de même nature que celle qui distingue entre sainteté et honnêteté (Cf. Kant et Nietzsche). 

Pourquoi alors, sur le fond, entre sagesse et sainteté, cette morale portative des petits gestes aux grands effets continue-t-elle d’être méprisée par les intellectuels (y compris théologiens), et dévalorisée par la société marchande ? 

A l’origine, Emmanuel Jaffelin, agrégé de philosophie enseignant au lycée Lakanal de Sceaux, a eu l’idée de cette étude, de ce pari philosophique, morale et pratique, hors de France. Après plusieurs années passées au Brésil en tant qu’attaché culturel de l’ambassade de France dans la capitale. Emerveillé par la convivialité et comblé par l’art de vivre des habitants de Brasilia et du pays-continent, il a constaté de retour en France l’absence de thèses académiques sur le thème de la convivialité, ce qui l’a conduit au sujet connexe de la gentillesse, également absent des grandes études historiques et systématiques malgré son potentiel tant oecuménique que républicain (Cf. Libération.fr. et  savoirchanger.org) (1). 

Notre philosophe français a ainsi livré à notre méditation et à notre réflexion une étude sur les fondements de notre rapport à l’autre – donc aussi sur la méchanceté -, non pas en termes de prévenance ou de sollicitude morale, mais de cordialité et de gentillesse, comme vertus sensuelles et caressantes. Comme un état d’esprit concrétisant ce qui pourrait être une forme laïque de l’amour au sens religieux – préfigurant l’avènement d’un nouveau gentilhomme. La désacralisation de la gentillesse en vertu laïque, n’excluant pas d’en faire une introduction à la vie spirituelle.   

Les chrétiens et les théologiens sont habitués à considérer la Pentecôte comme le don du Saint-Esprit – de sainteté, de sagesse et d’amour. Ils ont peut-être – nous avons certainement à le redécouvrir aussi comme l’Esprit de gentillesse.  Plus une parole est aimable, plus elle est convaincante, dit un proverbe (Pr 16, 21b).  (2)

David Gonzalez

 

(1) Au-delà de la journée de la gentillesse ** Voir sur le site psychologie.com ** , le « World Kindness mouvement » ** Voir son site : en anglais ** né au Japon en  1960 pour faire face à la montée de la violence à l’université, est aujourd’hui en réseau dans 19 pays.

    

(2) Pour aller plus loin et découvrir le dernier livre publié par Emmanuel Jaffelin : On ira tous au paradis. Croire en Dieu rend-il crétin ?, Flammarion, 2013, ** RDV sur le blog de l’auteur ** 

 

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