Psychologue, père d’une famille nombreuse, quel regard Claude porte t-il sur l’éducation?
Trois besoins
Il me semble que chez le petit enfant, il y a trois besoins fondamentaux. Et le rôle de l’éducation est d’y répondre.
Il y a un besoin d’amour. L’amour, c’est la reconnaissance de l’enfant tel qu’il est, l’affection pour l’enfant tel qu’il est, le respect de l’enfant tel qu’il est et la confiance qu’on doit lui manifester même si à certains moments ses actes peuvent être plus ou moins répréhensibles.
L’enfant a également besoin de normes dans sa vie.
La société dans laquelle il devra s’insérer comporte un certain nombre de règles.En l’absence de normes, il se sentirait exclu ou marginal.
Il y a également chez l’enfant un besoin de sécurité. Pour y répondre, il faut lui assurer un cadre de vie qui le protège du danger. Il y aura donc un certain mode de répréhension pour l’empêcher d’en sortir; mais ce cadre est une manifestation de l’amour des parents qui veulent lui permettre de vivre dans la paix.
L’éducation, c’est une question de climat d’amour assurant la paix et permettant l’insertion progressive de l’enfant dans un environnement plus large.
Images parentales
L’image des parents a une grande influence. Chaque parent offre pour l’enfant un modèle de vie : référence paternelle, référence maternelle. Les parents doivent en avoir conscience et ne pas s’autoriser à tout faire.
Lorsque l’enfant vit seul avec sa mère, celle-ci ne doit pas hésiter à lui donner des normes et, si possible, un référent masculin, par exemple, un membre de la famille, père, frère, ou cousin, qui puisse établir une relation intime avec l’enfant.
De même, les grands parents ont un rôle très important. Car, à travers leur tendresse et leur affection, ils offrent à leurs petits enfants un circuit d’acceptation et d’amour. Ceux-ci pourront quelque part les percevoir comme une référence, comme un « modèle ».
Une éducation ajustée à chacun.
L’éducation est difficile parce qu’elle doit correspondre à des enfants différents dans leur tempérament et dans leur position par rapport à leurs frères et soeurs.
Les parents ne réagissent pas de la même façon selon la place de l’enfant dans la fratrie. Il y a un risque de susciter des images négatives à travers les comparaisons. De même, assurer à l’aîné un statut spécial par rapport aux autres enfants est une source pour lui de déséquilibre.
La vraie rencontre.
Chaque enfant est unique mais il est difficile d’avoir une éducation adaptée à chacun. C’est pourquoi, il faut permettre à l’enfant des remises en question : accepter que l’enfant discute, qu’il pleure, qu’il se mette en colère, qu’il puisse vivre ses émotions. Il faut donner à l’enfant la possibilité de s’exprimer.
L’éducateur ne doit pas être rigide. Il doit accepter de ne pas être parfait. L’amour de Dieu s’adresse à nous tels que nous sommes. Le dialogue est une exigence. Le meilleur éducateur, c’est me semble-t-il, celui qui accepte d’être éduqué par son enfant.Alors la communication passe.
L’adolescence : un passage.
L’adolescence est un temps qui se prête aux manifestations inconscientes, aux résurgences. Il ne faut surtout pas en bloquer leur apparition. Le jeune essaie de prendre sa dimension. Il a donc besoin de s’affirmer. Les parents doivent reconnaître son besoin de gagner en indépendance. On peut se rappeler la parole de Jésus alors qu’il n’a qu’onze ans. « Il faut que je m’occupe des affaires de mon Père »(év.Luc;ch2.49)
Ce n’est pas toujours facile pour la maman pour qui l’enfant est encore souvent une partie d’elle-même.
Dans ces situations conflictuelles, les jeunes ont cependant besoin d’un accompagnement de leurs parents. C’est pourquoi ils les testent parfois pour éprouver leur consistance.
Eveil à la foi.
J’ai vécu dans un milieu familial où il avait des temps communs pour l’expression religieuse.
A l’adolescence, j’ai cessé d’y participer rompant aussi cette tradition de piété familiale. Sinon, je crois que je n’aurais pas pu accéder à une foi personnelle. Bien sûr, nous n’avons donc pas imposé cette prière pratique à mes enfants. Nous nous sommes efforcés, mon épouse et moi, d’éviter toute forme de conditionnement.
Bien sûr, la vie familiale comportait un certain nombre de normes : essayer d’être aussi vrai que possible, éviter toute tricherie, l’honneteté dans la vie, le respect de l’autre, en particulier des invités dans la famille. Et par ailleurs, nous avons pensé que le plus probant était de manifester notre vie spirituelle face à nos enfants. Nous nous sommes efforcés d’entretenir un climat de dialogue. Nous avons permis à nos enfants de discuter avec le droit de ne pas être d’accord avec nous.
Chacun de nos enfants à eu son propre itinéraire.
Alors qu’ils sont tous mariés, père ou mère de famille, nous voyons que nos prières n’ont pas été vaines. Pour chacun la grâce de Dieu a été efficace et cela souvent malgré nous, surtout malgré moi.
Ainsi, les cheminements ont été divers. Nous avons accepté qu’ils vivent leur propre itinéraire et même des formes de contestation. Cela n’a pas toujours été facile et nous avons vécu les problèmes dans la prière, sans jamais rompre la relation.
Aujourd’hui, nos enfants nous disent : vous nous avez donné des normes. Vous nous avez donné un climat spirituel qui nous permet maintenant d’être ce que nous sommes.
Ainsi, nous avons fait l’expérience que la bénédiction de Dieu repose sur le couple chrétien.
Aujourd’hui cette bénédiction repose sur les foyers de nos enfants.
Propos recueillis auprès de
Claude MEYNCKENS
Champigny (94)