Depuis l’apparition des communautés de base, Agathe Brosset est engagée dans ce mode d’expression de la vie chrétienne.
Elle nous dit comment les premières communautés de base sont apparues en 1973 à Nantes. C’est une période de recherche et d’effervescence. Il y a eu d’abord le souffle du Concile Vatican II et l’espérance qu’il a soulevé. La persistance des conservatismes a ensuite engendré des frustrations. Les évènements de 1968 ont témoigné d’une rapide évolution des mentalités. Au début des années 70, dans les milieux catholiques engagés dans la vie sociale et politique, le désir de nouvelles formes d’expression collective de la foi se manifestent avec force.

Ainsi, selon la description que nous en fait Agathe Brosset, en 1973, à Nantes, deux grandes communautés chrétiennes de base apparaissent. D’autres surgissent dans la région. Ces communautés s’inscrivent dans un courant dynamique où s’impliquent environ 250 personnes. Quelques prêtres, aumôniers de mouvement, jouent un rôle important dans la constitution de ce réseau social.

Depuis le début, Agathe Brosset est impliquée dans la vie d’une de ces communautés de base : « La Croisée des chemins ». Cette communauté réunit des personnes engagées dans la vie sociale et politique. Pour les chrétiens, cet engagement témoigne d’une foi qui met en avant une manifestation concrète de l’amour du prochain dans ses dimensions sociales et politiques. Pour d’autres, cet engagement est l’expression d’un idéal et d’une culture. Dans un respect réciproque, la diversité des motivations s’inscrit dans la dynamique de la vie communautaire. À la « Croisée des chemins », on se réunit, un dimanche matin, une fois par mois. A chaque fois, une équipe prépare une rencontre. Après un temps d’accueil, de petits groupes se réunissent pour un partage autour d’un thème. On s’entend, à la fin du partage, sur une parole commune qui sera portée au moment de la célébration. À l’époque, cette célébration s’inspire de la forme de l’eucharistie, et pour le repas du Seigneur, se réalise avec la participation d’un prêtre. Il y a ensuite un repas en commun. Beaucoup de jeunes couples participent à ces rencontres. Aussi, un  intérêt tout particulier est porté aux enfants. Comment leur proposer la foi chrétienne ?
Aujourd’hui, Agathe Brosset participe toujours à la « Croisée des chemins ». L’autre communauté de base existant à Nantes : « La Traversière » a été créée également dans les années 70. Ce sont maintenant de plus petits groupes : une trentaine de personnes à la « Croisée des chemins », 15 à 20 à la « Traversière ». La génération qui a participé dès le départ est toujours là et active, mais elle n’a pas été suivie par d’autres. La trame des rencontres demeure. Il n’y a plus de prêtre présent, mais on continue à célébrer le repas rappelant celui où Jésus a rassemblé les siens pour signifier le don de sa vie et les appeler à sa suite. Dans les premières années, la référence aux textes bibliques paraissait trop classique. Aujourd’hui, on a retrouvé le goût de la Parole. Et un approfondissement de la pensée s’effectue dans de petits groupes de partage qui se réunissent dans des rencontres mensuelles. Parmi les thèmes : le Premier Testament ; la lecture de livres significatifs ; une recherche d’expression : « Des mots pour le dire ».

En 1979, des chrétiens engagés dans différents courants très actifs à l’époque en milieu catholique se rencontrent à Chamerolles, près d’Orléans : communautés de base, Vie nouvelle, chrétiens critiques, équipes enseignantes, communautés du Renouveau charismatique. C’est à cette occasion que les communautés chrétiennes de base se constituent en mouvement national. Chacune de ces communautés a sa vie propre. Mais toutes mettent l’accent sur la dimension communautaire. Une instance commune est créée. Elle continue aujourd’hui à assurer une coordination. Ce courant existe également à l’échelle européenne. On peut lire sur le site de « l’Association Nationale des correspondants de communautés chrétiennes de base », les principes  communs à ces communautés : se laisser interroger par l’Evangile ;  la dimension communautaire dans tout ce qu’elle signifie et implique ; un rôle de « lieu d’église » ; engagement dans la société…

Active dans une communauté de base depuis les années 70 jusqu’à aujourd’hui, Agathe Brosset a  soutenu un mémoire sur la vie des communautés chrétiennes de base, en 1999, à la faculté de théologie catholique d’Angers.  Ces communautés sont autonomes par rapport à l’institution catholique, mais certains de leurs membres continuent à participer à la vie de l’Eglise institutionnelle. C’est le cas d’Agathe Brosset qui poursuit une recherche à long terme sur l’ecclésiologie et qui vient de soutenir une thèse de doctorat sur des formes émergentes qui apparaissent actuellement dans les aumôneries d’hôpitaux : compagnonnage et partenariat. ** Lire l’article ** Elle nous décrit également des innovations en cours dans quelques paroisses de Nantes : un « pôle solidarité vigilance » qui associe des mouvements chrétiens et non chrétiens dans des actions de solidarité, le « passage Sainte Croix » qui ouvre un espace d’accueil à des expressions culturelles,  « Accueil à toute détresse » qui offre attention et soin aux personnes en difficulté.

Dans les aumôneries d’hôpitaux comme dans certaines formes de catéchèse et pratiques pastorales, on pratique une « relecture » des évènements à travers laquelle on cherche à discerner l’œuvre de l’Esprit aussi bien dans ceux avec qui on partage et vers qui l’on va que dans notre propre démarche. Agathe Brosset nous dit combien cette pratique est importante pour elle. Cette pratique l’inspire dans sa participation toujours active à la « Croisée des chemins ».

 

Jean Hassenforder

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