QUESTION SUR L’HISTORICITE DU NOUVEAU TESTAMENT

La vie de Jésus, telle que nous la transmet le Nouveau Testament présente-t-elle un caractère historique sur lequel nous pouvons nous appuyer, ou bien est-elle le produit de représentations peu fiables engendrées par des communautés elles-mêmes mal connues ?

Certes, la cohérence du message (1) s’inscrit en faux contre une apparition hasardeuse. Mais comme l’écrit un exégète (2), l’argument du philosophe et théologien CS Lewis qui fonde la divinité de Jésus sur l’éminence de ses actes et des ses paroles requiert un minimum d’historicité des données qui nous sont transmises. Ainsi, nous ne pouvons récuser les questions qui nous sont posées à propos de la fiabilité du message qui nous est communiqué par le Nouveau Testament. Or, à travers les médias, de temps à autre, des doutes et des oppositions sont véhiculés quant à la véracité des Evangiles. A vrai dire, on observe également des divergences sensibles chez les érudits eux-mêmes. Certains manifestent un scepticisme quasiment systématique. C’est le cas du « Séminaire de Jésus » aux Etats-Unis. Les chrétiens ne peuvent se désintéresser de ces questions. Elles les concernent tant dans la conception de leur foi que dans le dialogue avec leur entourage. Comme chrétiens, nous sommes appelés à être attentifs aux informations qui nous parviennent par différents canaux. Ainsi en Grande-Bretagne, l’association Damaris (3) analyse soigneusement les œuvres médiatiques pour s’interroger à leur sujet dans une perspective biblique. « Témoins » entretient une relation convergente avec cette association. Aujourd’hui, nous nous interrogeons sur les émissions diffusées sur la chaîne de TV Arte et portant sur « l’origine du christianisme ». Il y a quelques années, les mêmes auteurs avaient réalisé une autre série sur un moment de la vie du Christ : « Corpus Christi ». Des amis présentent ici leurs questionnements vis-à-vis de la construction des récentes séries.

Données pour l’historicité

Cependant la foi chrétienne, telle qu’elle se vit dans la culture de Témoins, s’appuie sur une intelligence des textes qui privilégie l’historicité du message.

A cet égard, nous pouvons nous reporter au grand exégète britannique NT Wright. Dans son livre « the challenge of Jesus » (4), NT Wright nous montre combien la question de l’historicité est importante. Dans quelle mesure la vie de Jésus, telle qu’elle nous est rapportée, correspond-elle à une réalité historique ? Nous renvoyons le lecteur à l’analyse très argumentée de cet exégète. Celui-ci nous dit entre autres, que si les savants de l’époque des Lumières ont eu raison de poser la question, ils ont, par ailleurs, assorti le travail qui a suivi jusqu’à nos jours, d’une méthodologie contestable, « en opposant l’histoire et la foi, les faits et les valeurs, la religion et la politique, la nature et la surnature » (p. 7). L’interprétation des événements tient beaucoup à la culture et à la conception du monde dans lesquels on évolue. Ainsi, dans une perspective scientiste, toute manifestation « surnaturelle » est à priori refusée si bien que les événements correspondants seront rejetés. Aujourd’hui, le « paradigme scientiste » a perdu sa suprématie. Les pratiques nouvelles qui se manifestent dans les courants pentecôtistes et charismatiques contribuent, entre autres, au renouvellement des interprétations. Cependant, le progrès même du travail historique modifie également les perspectives. Ainsi NT Wright montre comment une meilleure connaissance du judaïsme du premier siècle éclaire en regard les comportements de Jésus tels qu’ils nous sont transmis par les Evangiles.
On pourra se reporter à un livre de cet auteur traduit en français et très innovant : « Jésus, retour aux sources. La vie et la vision d’un révolutionnaire » (5)

D’autres lectures nous ont également éclairé. Craig Blomberg a traité de la fiabilité historique des Evangiles dans deux ouvrages qui nous présentent une argumentation plausible, parce qu’à la fois bien instruite et sans excès (6). Le livre sur l’Evangile de Jean présente chaque passage dans une comparaison méthodique avec les données issues des évangiles synoptiques, et aussi dans mise en relation avec les données de l’Ancien Testament et avec le contexte historique de l’époque. En nous permettant de lire l’Evangile de Jean sur plusieurs registres, ce livre nous aide à entrer dans la vision spirituelle de l’évangéliste. Voici un ouvrage qui mériterait d’être traduit en français.

Qu’on voit dans notre réflexion, les questionnements et les réponses d’un chrétien qui n’est en aucune façon, versée dans les études exégétiques, mais qui expose ici un cheminement de pensée dans le sentiment qu’il est bon de partager entre chrétiens ces questionnements et ces réponses. D’autres contributions seraient bienvenues.

Jean Hassenforder
Mai 2004

(1) Henry (Michel), Paroles du Christ, Seuil, 2002
(2) Blomberg (Craig) The historical reliability of the gospels, Inter-Varsity Press, 1987, (Cf p. 20)
(3) www.damaris.org
(4) Wright (NT), The challenge of Jesus, SPCK, 2000
(5) Wright (Tom), Jésus : retour aux sources. La vie et la vision d’un révolutionnaire, Excelsis, 1998
(6) Blomberg (Craig), The historical reliability of the gospels, Inter-Varsity Press, 1987.
Blomberg (Caig), The historical reliability of John’s Gospel. Issues and Commentaries. Inter-Varsity Press, 2001.

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