C’était dans les années de feu pour l’équipe de Témoins, qui se retrouva pour une semaine d’été dans les Cévennes minières. Une nuit, notre hôte nous guide vers une étendue plate et aride. En regardant bien, nous découvrons sortant du sol des dizaines de flammèches.
Malgré des années de normalisation et d’oubli, la mine continuait souterrainement à brûler.

Et les voitures ont flambé du 9-3 au 7-8…
Mais que nous est-il donc arrivé ? Et si soudainement… ?
Ah non ! Ancien sartrouvillois du quartier du Plateau, je peux témoigner que le feu couvait sous la cendre depuis plus de vingt cinq ans. Avec déjà de malheureux incendies.

Et ces jeunes , comment les percevoir ?
Ecoutons un député (UMP) du 7-8 : « Ce qui s’est passé dans les banlieues n’est que l’expression de la désespérance. Ceux qu’on a appelés les “émeutiers” en étaient les porte-parole. Je n’imaginais pas que la France était dans cet état-là. »

Nos églises aussi se sont exprimées, et très rapidement.
Quelques exemples :
« Cette violence inadmissible est un cri d’écorchés vifs qui se fait entendre depuis longtemps et qui a simplement pris plus de force et d’extension ces jours-ci. Le combat pour une réelle égalité des chances continue. » (Mgr Daucourt, évêque de Nanterre, le 9/11) ;
« Notre responsabilité chrétienne et citoyenne est de dépasser les intolérances et les amalgames, pour oeuvrer sur un terrain de dialogue et de respect afin de construire une société où chacun puisse trouver sa place. » (Pasteur J-C Tenreiro, Pdt du Conseil régional de l’Eglise Réformée de France, le 5/11)
« Les événements de ces jours-ci doivent tous nous interroger. Nos choix, individuels et collectifs, concernant l’organisation de la vie en société, peuvent nous conduire, de fait, à créer ou entériner des situations d’exclusion ou de ghetto. La responsabilité collective est du ressort des décideurs politiques et économiques. Mais elle interpelle aussi la conscience de chacun.
L’égalité et la fraternité, conditions effectives de la liberté, sont dans les mains de tous. » (Mgr J-P Ricard, Pdt des évêques de France, à l’issue de leur assemblée de Lourdes le 9/11)

Que faire ?
– Côté répression, c’est bon : on est en état d’urgence, les voitures ne brûleront pas à la St Sylvestre cette année (Quoique…).
– Côté action, on est partis pour de très longues années. Elus ou simples citoyens, nous sommes attendus au tournant. Un tournant à ne pas louper pour ne pas partir dans le décor !

INTERPELLEZ VOTRE MAIRE !

Alors le Secours Catholique a lancé un pavé dans la mare, qui vous a peut-être échappé.
« Le manque de logements sociaux et la question de la mixité sociale sont au centre des questions soulevées ces derniers jours par la crise que traverse notre pays. » «Si les 742 communes aujourd’hui concernées, respectaient la loi leur imposant 20% de logement social sur leur territoire, il serait possible de loger 830 000 personnes, grâce à 360 000 logements supplémentaires, soit le tiers des besoins actuels», souligne le 15/11 l’association, qui publie la liste de ces communes sur son site Internet (pour télécharger l’étude, cliquer ici).

Et le Secours Catholique de proposer aux chrétiens une première action toute simple : il invite les habitants des communes concernées à demander à leur maire de se mettre en conformité avec la loi.
Il demande aussi l’augmentation des pénalités afin de les rendre suffisamment significatives pour les contribuables concernés.

Alors donc, puisque les chrétiens sont sociologiquement très présents dans les communes concernées, allons-y, avec le feu de la foi, allons voir notre maire (peut-être pas en procession, tout de même) :
– de Longpont-sur-Orge (1,8% de logements sociaux), Neuilly sur Seine (2,6%), Nanteuil-lès-Meaux (3,4%), La Celle-Saint-Cloud (3,6%), Le Raincy (4,3%), Enghien-les-Bains (7,9%), Saint-Mandé (8,2%) ou bien sûr Paris (14,3%),
– mais aussi de Bordeaux (14,4%), Nice (10,9%), Haguenau (9,8%), Biarritz (7,1%), Saint-Raphaël (6,6%) ou Biguglia (près de Bastia, un petit… 0,0% !)… et plus de 700 autres !

LE FEU DE LA JEUNESSE

Bon, et ces jeunes, qu’en fait-on ? Pour ma part, je crois qu’une bonne part des solutions viendra de ces « banlieues » elles-mêmes. Mais il y a une condition.
Gérard Daucourt la résume ainsi : « La foule des jeunes non-violents mais sans espoir a besoin de confiance, d’encouragements et d’un dialogue qui ne soit pas seulement de circonstance. (…) Leurs questions de fond sont simples : “Est-ce que vous nous aimez ? Est-ce que vous croyez en nous ? Est-ce que vous êtes prêts à nous faire et à nous refaire confiance ?” Il est plus urgent que jamais de répondre par des rencontres, des attitudes, des actes. Toutes les communautés catholiques – et pas seulement celles des banlieues – sont concernées au quotidien si elles ne veulent pas faire mentir le message du Christ. »

Une question de Confiance, donc. Quand on aide la confiance à se développer, elle se transmet à tous et c’est toute la Société qui avance. C’est pour cela que nous devons changer nos coeurs : pour faire grandir la Confiance (*)

Et dans mon désert minier des Cévennes ? De l’herbe pousse, opportuniste. Elle attaque par les côtés, puis grignote patiemment son territoire. Elle s’enracine, peu à peu plus profondément. D’abord « mauvaise herbe », elle va créer les conditions d’un terrain de plus en plus fertile, où toutes les plantes pourront s’épanouir en confiance.

Yves Desbordes, le 27/12/2005

(*) Cette phrase ne vous est pas inconnue ? Vous pensez que j’ai honteusement détourné le slogan d’une pub bancaire très récente ? Vous rigolez, y a pas écrit La Poste, là !

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